Jen Steen -La mangeuse d'huitres, 1658, Mauritshuis, La Haye
Une jeune femme nous regarde avec coquetterie, tout en préparant une huître. Les huîtres étaient connues pour être aphrodisiaques et cette jeune femme semble offrir davantage qu’un excellent mets.
Cette servante aurait très bien pu être celle dont parle Rimbaud dans « La Maline »
La Maline
Dans la salle à manger brune, que parfumait
Une odeur de vernis et de fruits, à mon aise
Je ramassais un plat de je ne sais quel met
Belge, et je m’épatais dans mon immense chaise.
En mangeant, j’écoutais l’horloge, – heureux et coi.
La cuisine s’ouvrit avec une bouffée,
– Et la servante vint, je ne sais pas pourquoi,
Fichu moitié défait, malinement coiffée
Et, tout en promenant son petit doigt tremblant
Sur sa joue, un velours de pêche rose et blanc,
En faisant, de sa lèvre enfantine, une moue,
Elle arrangeait les plats, près de moi, pour m’aiser ;
– Puis, comme ça, – bien sûr, pour avoir un baiser, –
Tout bas : « Sens donc, j’ai pris ‘une’ froid sur la joue… »
Arthur Rimbaud, Poésies
Commentaires
Poésie et Peinture ah quel beau mariage !
Écrire avec ses bleus, peindre de tous ses maux
Deux arts se mélangeant comme unis en Gémeaux
Pour composer de l'or du plus bel alliage.
Bonsoir Alain
Une totale découverte qui m'émerveille assez pour aller satisfaire la curiosité que tu as fait naître en moi grâce à ce texte émoustillant.
Bises et bonne nuit
J’adore décrire sur cette peinture hollandaise qui m’enchante. Je te donne un autre extrait de la « Lettre d’amour » de Vermeer :
« La servante vient d’interrompre son travail pour remettre une missive à sa maîtresse qui se distrait en jouant du luth. Soucieuse, la musicienne arrête de jouer, redoutant l’ouverture de l’enveloppe. Lèvres entrouvertes, l’inquiétude amoureuse se lit dans son regard qui interroge la servante : rupture ou rendez-vous ? Observe la mine réjouie de celle-ci qui s’épanouit d’un sourire complice, presque ironique. Elle a laissé en plan ses travaux de ménage et semble pressée de connaître le contenu de la lettre qui l’intrigue tout autant que sa maîtresse. Le drame se noue… Les deux femmes se regardent, réunies dans une même interrogation immobile. »