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Rechercher : un pastelliste heureux

  • La Grenouillère

     

    VAN GOGH Vincent - Bords de l’Oise, la Grenouillère, 1890, The Detroit Institute of Arts

     

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    Texte extrait du roman à venir sur décembre: QUE LES BLES SONT BEAUX - L'ultime voyage de Vincent Van Gogh

     

     

     

         Deux skifs effilés passèrent à grande vitesse sous les encouragements des barreurs qui imprimaient la cadence. Les hommes, habillés de maillots rayés, brassant l’eau à grands coups de pelles, grimaçaient dans l’effort, avec des « han » retentissants. Des vaguelettes agressives s’écrasèrent bruyamment sur les bateaux immobilisés, soulevant les coques de secousses ondulantes. Je suivis les skifs du regard. Ils disparurent derrière une rangée d’arbres. Dans l’eau, les reflets colorés des embarcations s’effacèrent un court instant, puis le calme revint.

         Je m’installai face aux bateaux assoupis, pris la toile de 30 que j’avais apportée et la posai
     horizontalement sur le chevalet. Le décor fut sommairement esquissé au pinceau. Des tons purs excitaient mes yeux. Il suffisait de les poser sur la toile tel que je les voyais : verts bleutés dans le feuillage des arbres ; bleu céruléen dans l’angle de ciel au-dessus de l’île sur la gauche ; le même bleu brossé à grands traits dans l’eau, additionné d’un soupçon d’outremer et de violet sur les parties ombrées.

         Les embarcations bigarrées se superposaient en forme de triangle. Dans une des barques, une jeune femme en robe claire était assise. Un blanc pur la balaya. La base du triangle était constituée par cette imposante yole rouge orangée qui prenait toute la largeur de la toile. J’écrasai le tube de rouge vermillon sur celle-ci et étalai la pâte avec délectation. Le rouge… Le midi m’avait révélé cette couleur qui embrasait les paysages. Autrefois, je l’utilisais peu, la campagne hollandaise ne s’y prêtant guère.

         Dans le frais, je rajoutai du jaune de cadmium qui transforma le rouge de la yole en un orangé éclatant. Une petite touche de rouge pur couvrit la coque et la voile de l’esquifpeinture,van gogh,auvers,grenouillère accosté à l’extrémité de l’île en haut de la toile. Une goutte de blanc sur la voile suffit ensuite pour la rosir.

         Le soleil cuisait sérieusement mon profil gauche. Je posai mes pinceaux dans un gobelet en fer, me levai et m’agenouillai devant la rivière. Une image déformée, peu engageante, la mienne, m’apparaissait dans l’onde liquide. Après m’être aspergé plusieurs fois le visage, je revins vers mon chevalet.

         Les couleurs claquaient… Où était passé l'impressionniste que j'étais devenu à Paris ? Mes amis seraient surpris s'ils voyaient mes peintures... Quelle chose étonnante que la touche, le coup de brosse… On travaille comme on peut, on remplit sa toile à la diable sans trop calculer, exalté par le motif. Exagérer l’essentiel et laisser dans le vague le banal… Ainsi, on attrape le vrai… La critique m’importait peu. Je n’avais plus de temps à perdre à tenter de convaincre ceux qui ne comprenaient pas mon travail. Je voulais exister avec mes défauts et mes qualités, et, surtout, ne pas accepter le conformisme ambiant.

         En pleine réflexion picturale, je n’avais pas entendu arriver ce couple debout en plein soleil peinture,van gogh,auvers,grenouillèredevant les barques vertes et blanches, sur la petite bande de terre servant d’embarcadère. L’homme en costume bleu à col de marin et chapeau noir s’apprêtait à tirer une embarcation. La femme en robe blanche, une capeline jaune citron posée sur de longs cheveux relevés derrière la tête, semblait s’interroger sur la méthode la plus efficace pour grimper dans le bateau sans se prendre les pieds dans sa robe longue. Je me hâtai de les croquer sur la toile avant qu’ils n’embarquent. Le jaune clair que j’étalai autour d’eux les inonda de lumière.

         La jeune femme se décida à retrousser sa robe jusqu’au bas des cuisses et monta dans la barque aidée par son compagnon reluquant ses dessous. Elle s’assit à l’avant, peu rassurée. L’homme saisit les avirons, piocha l’eau maladroitement, ce qui fit tanguer l’embarcation et hurler sa compagne. Il trouva le bon coup de pelle et la barque se dirigea vers l’île sous les roucoulements aigus de la femme.

         Je posai ma palette sur le sol et sortis le pain et le gros saucisson que madame Ravoux m’avait mis dans ma musette ce matin. Je tirai la corde que j’avais accrochée au goulot de la gourde plongée dans l’eau en arrivant, but une longue rasade et la renvoyai au frais.

        Ragaillardi, je m’allongeai sous l’ombre d’un saule. Mon corps rassasié s’amollissait progressivement.

     

     

  • Les couleurs du temps

     

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         Les poèmes de Francette lg sont des bribes de pureté, des petits grains de vie qui feront chanter la pluie. C’est un amour de la création, un amour de la vie qui est donné ici en partage. Et c’est plein d’espérance pour notre monde souvent désorienté.

    Jean Pierre Boulic, poète Breton

     

         Je ne vais pas mâcher mes mots. Nous sommes dans le BEAU. Dans cette période anxiogène qui nous est imposée, une bouffée d’oxygène nous arrive sous la forme de ce recueil de poèmes de Francette lg. Je me suis déjà offert mon cadeau de Noël : deux recueils de poésie de cette auteure. Je donnerai de courts extraits des deux avant la fin décembre.

     

         Aujourd’hui, la source d’inspiration de ce recueil est l’oiseau arc-en-ciel qui est allé quérir les couleurs du temps tout au long de l’année. J’espère que Francette ne m’en voudra pas de lui avoir emprunté quelques photos, qui sont aussi belles que les écrits, afin de donner vie aux poèmes.

     

     

     

    Quand le ciel pleure de joie, le printemps est là :

     

    Le piano du renouveauphotos,poèmes,francette lg

    Égrène ses notes

    Sur le voile de l’aube

    Arpège sur les cordes du vent

    Douce mélodie qui fait danser la lumière

    Et qui s’abreuve des gouttes du temps

    Les fleurs encore toute engourdies

    Se parent de corsage émeraude

    Et de jupon de dentelle rose nuit 

     

     

    Le jardin s’éveille :

     

    photos,poèmes,francette lgEt dans le murmure

    De l’aube qui vient de s’éveiller

    C’est une symphonie !

    Un hymne à la vie

    C’est une enluminure !

    Une page d’écriture.

    Va vite cueillir les petits grains de vie

    Qui caressent ton jardin ébloui !

     

     

    L’été vient d’arriver soudainement :

     

    Vagabondagesphotos,poèmes,francette lg

    Dans des livres d’images

    Où le bleu

    Est celui de tes yeux

    Où le blanc

    Est celui du nuage du matin

    Qui prend le vent

    Par la main 

     

     

    Les vagues déferlent sur la plage :

     

    photos,poèmes,francette lgAccrocher des baisers

    Aux branches de l’écume

    Et se laisser bercer

    Par la chanson des elfes

    De la dune 

     

     

     

    Un jardin nous offre sa parure de pluie :

     

    Surprendre

    Endormi dans sa bulle,

    Le petit jardin funambule.photos,poèmes,francette lg

    Miroir éphémère

    Après l’éveil de la terre. 

     

    À la croisée des filandres de soie

    Elle retient son souffle

    Elle boit la lumière

    Goutte après goutte

    Sans que personne ne la voie

    Coûte que coûte

     

     

    Un peintre s'inspire du ciel et des fleurs :

     

    photos,poèmes,francette lgDans le vertige du ciel :

    Un signet

    La palette diaprée

    Du peintre

    Tintinnabule

    Et fait vibrer

    Le grand drap bleu

    De l’été camaïeu. 

     

     

    L’automne nous surprend lorsque l’on ne s’y attend pas :

     

    L’arbre tisse son manteauphotos,poèmes,francette lg

    De Bronze, de miel et d’or

    Et dans ce clair-obscur

    Tout se tait…

    Et tout chantonne

    Dans ce timide automne

    Jouant encore sur les rayons dorés

    Avant d’aller se coucher… 

     

     

    Quelques feuilles s’envolent :

     

    photos,poèmes,francette lgJe regarderai choir

    Une à une les médailles d’or

    Du petit arbre mirliflore.

    Et je les entendrai gémir

    Dans le silence pur et blanc

    De l'hiver impatient

     

     

     

    L’hiver est arrivé, la mer rugit :

     

    Ici les flocons blancsphotos,poèmes,francette lg

    Sont ceux de l’écume

    Ceux de la vague qui ondule

    Les montagnes blanches

    Sont les rouleaux

    Qui font le gros dos 

     

     

     

    photos,poèmes,francette lgIci, l’alpiniste c’est la mouette

    Qui grimpe jusqu’à la crête

    La mouette qui parade

    La mouette qui escalade

    L’échelle du temps

    L’échelle du vent

    Couronnée d’argent 

     

     

     

    Pour avoir une véritable idée de la beauté de ce recueil il faut le lire en entier avec les images. Francette en offre la vision sur son blog : https://images-imagination.blogspot.com/

    Ou en édition papier : : https://www.thebookedition.com/fr/4583_francette-lg

     

     

  • Marl'Aime une poétesse de talent

     

    Marl'Aime, poésie

     

    Mon ressenti récent sur le recueil poétique de Marl'Aime publié sur le site de Babelio

     

    « Mon incompréhension du monde actuel s'accroît sans répit ainsi que mes doutes à nous voir parvenir à réprimer les flots de ces penchants criminels, intégristes, vénaux, irrespectueux ou simplement stupides qui le polluent au quotidien. Cependant, je demeure combative car je peux désormais d'un revers de plume expulser ma révolte, faire levier de mes mots afin de libérer la pression sur mon coeur. »

    Voilà ce qu'écrit en guise de présentation de son recueil, Marlène Martinvalet dont le nom de plume est Marl'Aime.
    J'ai pensé au poète Stéphane Mallarmé en lisant. Comme celle de Mallarmé, la poésie de Marl'Aime est moderne, brillante, technique, intelligente. Elle aime nous faire découvrir des mots rares, pour la rime, le coup de coeur, mais aussi pour leur musicalité, leur esthétique.
    Certains poèmes m'ont été énigmatiques, leur langage résistant à la raison de ceux que je lis habituellement. Toutefois, j'ai senti dans ces quatrains et autres sonnets somptueusement écrits, une vibration dans les phrases, un gros travail de recherche dans la syntaxe et les mots qui m'ont laissé admiratif.

    J'ai beaucoup aimé en début de recueil un poème consacré à son papa mort jeune alors qu'elle était une petite fille :
    « Rien ne sert de maudire à grands flots cette année
    Qui me priva si jeune, éclipse instantanée,
    Du géniteur soleil par lequel je suis née
    Peu me chaut de savoir en fait lequel appât
    De mes filets d'amour hier la mort happa
    Afin de t'éloigner, tu vis en moi, Papa. »

    Les lecteurs vont se faire une idée dans quelques extraits de poèmes du talent si particulier de l'auteure. Elle nous fait partager ses élans d'espoir et de révolte : « le temps que dure ici notre humain ministère /Chacun de nous met mal ou bien sur sa balance /Des droits que lui prescrit son propre baptistère (chapelle) /Mais il en recevra du ciel l'équivalence ! ».

    Les maux de ce monde sont son combat : intolérance, violence, bassesse, victimes innocentes, injustice, misère. Sa plume se veut un remède au désespoir qui pourrait l'atteindre :
    « Mon dieu je t'en supplie allège ma tristesse,
    Devant ces miséreux lentement je me meurs,
    Car cette déchéance étouffe mes humeurs,
    Donne-moi le pouvoir d'écrire avec justesse ! »

    La politique la révolte : « La droite ou la gauche on cesse d'y croire, /Pleine est la coupe à cortex cérébral, /De cette Chienlit d'ordre électoral /A coup de serments d'éden illusoire. »

    Comment ne pas adhérer à une pensée exprimée avec cette force poétique ? : « Mais la plus belle chose à laquelle je tiens, /Pouvant réconcilier musulmans et chrétiens, /Jeunes et plus âgés, ou même d'avantage, /La chose qui m'émeut en doux pleurs triomphants, / Sans hésitation, c'est d'en faire partage, /Et de voir se transmettre un savoir aux enfants. »

    En humaniste, elle s'interroge sur l'avenir de l'homme :
    « Sortirons-nous grandis en combattant nos failles !
    Celles qui font le nid où s'éveillent les maux
    Lors ma muse surgit pour m'insuffler les mots…
    Sortirons-nous grandis en combattant nos failles ? »

    À la fin du recueil, j'ai eu une dernière pensée pour Stéphane Mallarmé. Il disait que le poète doit « Tout reprendre à la musique », « Peindre non la chose, mais l'effet qu'elle produit », et « Laisser l'initiative aux mots ». Il avançait qu'il ne fallait pas nécessairement vouloir comprendre la poésie, au sens de son intelligibilité, mais l'éprouver comme une véritable jouissance simplement sensible, musicale et plastique. Une anecdote se rapporte à son ami le peintre Edgar Degas qui se plaignait devant lui de ne pas réussir à écrire des poèmes alors que, disait-il, il avait « beaucoup d'idées ». Mallarmé lui aurait répondu : « Mais mon cher Degas, ce n'est pas avec des idées que l'on fait les poèmes, c'est avec des mots ».
    Le style et la recherche poétiques de Marl'Aime m'ont paru proche de ce poète du 19e.

    Venu récemment en poésie, je ne peux que me fier à mes sensations. C'est la première fois que je lis une poésie aussi originale, jonglant avec les mots, parfois hermétique, intellectuelle jusqu'au bout des ongles. L'auteure nous livre ses sentiments, les met à nu sans chercher à plaire.

    « du sonnet au lai mon coeur est ivre,
    Et pour l'art d'un haïku
    Leste au Kaizen ma muse se livre,
    Il me reste moins de temps à vivre
    Que je n'ai vécu.

     

    "Kaizen : processus d'amélioration continue



    Merci Marl'Aime

     

  • Les Grâces de Rubens

    EXCELLENTE ANNÉE 2023 

     

    Rubens, Louvre, galerie Médicis

     

     

    « Rubens ne se châtie pas et il fait bien. En se permettant tout, il vous porte au-delà de la limite qu’atteignent à peine les plus grands peintres ; il vous domine, il vous écrase sous tant de liberté et de hardiesse. » - Eugène Delacroix, 1860

     

         Lorsqu’une scientifique émérite mène en parallèle une carrière de peintre, de sculpteur sur pierre et de copiste au Louvre, cela donne ce livre d’enquête de Sigrid Avrillier consacré au thème des trois Grâces, dont l’origine remonte à la mythologie grecque, et à sa représentation picturale par le maître flamand Pierre Paul Rubens. L’image est indispensable lorsque l’on parle de peinture. L’iconographie des Éditions Macenta est à la hauteur du texte.

     

     

         Rubens, certainement le peintre le plus important de la peinture flamande au 17e siècle, était un peintre érudit, parfois ambassadeur, très recherché par les cours européennes.

     Rubens, Louvre, galerie Médicis     J’ai souvent admiré ses toiles croisées au Louvre : une fête de la couleur et des corps dénudés à la chair joyeuse. Eugène Delacroix qui adorait copier les néréides, plantureuses jeunes femmes d'une sensualité débordante, s’en était inspiré en 1822 pour peindre les corps des figures nues au pied de la barque de son « Dante et Virgile aux enfers ».

     

     

     

     

     

     

     

    Pierre Paul Rubens – Le Débarquement de Marie de Médicis à Marseille, 1623, Louvre, Paris

     

         Dans diverses visites d’expositions, les Grâces m’apparaissaient parfois : Raphaël au château de Chantilly, Lucas Cranach au Louvre, ou « Le Printemps » de Botticelli.

    Cranach, trois grâces

    Lucas Cranach - Les trois Grâces, 1531, Louvre, Paris  

       

         L’auteure nous invite à découvrir une des toiles « L’Instruction de la reine » qui fait partie des 24 immenses tableaux commandés en 1622 à Rubens par la reine Marie de Médicis, illustrant sa vie comme seconde épouse du roi Henri IV et mère de Louis XIII. Ce cycle des tableaux a été peint par l’artiste de 1622 à 1625 pour être accroché au palais du Luxembourg édifié par la reine. Depuis 1816, la galerie Médicis, dans l’aile Richelieu du Louvre, sous un bel éclairage zénithal, s’enorgueillit aujourd’hui de les posséder. Je conseille fortement la visite de ce lieu magnifique.

    Rubens, Louvre, galerie Médicis

    Pierre Paul Rubens – L’instruction de la reine, 1623, Louvre, Paris

     

         Le mythe des trois Grâces apparait dès le 7e siècle av. J.-C., dans le culte des « Charites » chez les Grecs. Filles de Zeus, elles sont les divinités de la prospérité et de la croissance, donnant aux mortels comme aux dieux, joie, paix, beauté, fécondité. À partir du 4e siècle, elles échangent leurs vêtements pour des voiles puis se dénudent complètement. Très populaire chez les Grecs et Romains, on va les retrouver partout dans des peintures, fresques, mosaïques, monnaies ou décors d’églises. Oubliées au Moyen Âge, elles réapparaissent vers la fin du 15e siècle.

     

    Charites

    Marbre pentélique peint - Relief des Charites, 6e siècle av. J.C., Athènes, musée de l'Acropole

     

         L’analyse de l’auteure est lumineuse sur la présence et la place des Grâces dans le tableau.

    Rubens, Louvre, galerie Médicis

    Pierre Paul Rubens – L’instruction de la reine, détail des trois Grâces, 1623, Louvre, Paris

     

         Rubens voulait représenter les Grâces dans une attitude originale, deux de face et une de trois quarts, à la manière « baroque » en s’affranchissant de la morale chrétienne. Toutefois, il devait satisfaire la reine très catholique. Il fallait également faire l’apologie de celle-ci et redorer sa réputation. La place occupée par la beauté et la grandeur des Grâces dans le tableau ne pouvait que plaire à la reine en soulignant son avenir prometteur : devenir la reine du Royaume de France et assurer la lignée des bourbons en donnant un fils au roi. Louis XIII naissait seulement neuf mois après sa rencontre avec Henri IV. Le contrat était rempli.

     

         Après ce cycle pour Marie de Médicis, présentant des femmes très classiques, sages, « grecques », le maître allait continuer à peindre des Grâces pour d’autres commanditaires. Son mariage en 1630, il a 53 ans, avec la très jeune Hélène Fourment lui permit de retrouver les grâces nues aux formes très rondes qu’il affectionnait. Le tableau actuellement au Prado « Les trois Grâces nues » montre sa femme Hélène représentée trois fois. Le Rubens voluptueux est de retour : les Grâces se frôlent, se caressent, laissent dans les chairs l’empreinte de leurs doigts.

     

    Rubens, Louvre, galerie Médicis

    Pierre Paul Rubens – Les trois Grâces nues, 1638, musée du Prado, Madrid

     

         Je termine sur la très belle description du travail de copiste effectué durant trois mois dans la galerie Médicis par Sigrid Avrillier sur une toile de format 1,46 x 1,14 m : une belle dextérité dans le rendu des carnations et glacis, avec le fameux « sfumato » cher à Léonard de Vinci dans les contours. La mise en page devait être très respectueuse de l’esprit du cycle et de sa poésie. « J’ai osé, moi aussi, une « interprétation », comme Rubens », dit la copiste.

     

         Ce livre, technique, érudit, demandant un gros travail de recherche, est très riche. J’ai découvert un pan de la mythologie grecque que je connaissais peu et la peinture de Rubens que j’admirais depuis longtemps et qui m’est devenue familière.

     

  • Si on lisait ?

     

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    Pierre Auguste Renoir - La liseuse, 1876, musée d'Orsay, Paris

     

    Et si vous lisiez…

         Je sais ce que vous allez me dire : votre bibliothèque est pleine de livres. Vous aimez leur odeur poussiéreuse, savant cocktail de papiers défraîchis, d’imprimerie vague, de reliures jaunies par le temps. Vous défaillez de plaisir lors de vos recherches dans les rayons, une jouissance ineffable vous envahit lorsque, tournant lentement les pages, vous palpez sous vos doigts la texture de la feuille. Puis… vos livres ont une histoire : des achats coup de cœur sur les quais de la Seine, le Diderot déniché dans le grenier du grand-père, le cadeau du cousin Paul… Bref, vous ne pouvez vous passer de vos compagnons de solitude.

         Vous vous demandez alors pourquoi je vous conseille bêtement de lire ? J’y viens…

     

         Je vous propose, naïvement, en cette période de Noël, de lire autrement. Rassurez-vous, je ne reviendrais pas sur la lecture numérique devant un écran dont je vous parlais dans mon dernier article ! Mais… pourquoi ne tenteriez-vous pas la lecture audio ?

         Depuis, plusieurs années, à la suite de problèmes visuels récurrents, je me régale des livres téléchargeables gratuitement sur le site : Litteratureaudio.com. J’ai eu envie, par cet article, le dernier de l’année, de remercier l'association et vous la faire connaître.

         Le site de cette association « Des Livres à Lire et à Entendre », créée il y a une dizaine d’années, a pour objet de faciliter l’accès à la lecture de tous, et en particulier des non-voyants et des malvoyants. L’équipe de l’association est composée entièrement de bénévoles dont le but unique est de faire partager les joies de la littérature.

         Cette fois, il ne s’agit plus de nos petites bibliothèques poussiéreuses ! Celle-ci est  immense : Hugo, Flaubert, Zola, Balzac, Maupassant, Dumas, Stendhal, Tolstoï, Voltaire… Et combien d’autres… Tous les textes libres de droits sont devenus accessibles en format mp3.

         Soigneusement sélectionnés, 225 donneurs et donneuses de voix, adeptes de la lecture à voix haute, enregistrent eux-mêmes leurs textes et les soumettent à l’approbation de l’équipe, avant leur diffusion. Ainsi, vous pouvez retrouver, parmi ceux que j’apprécie le plus : René Depasse, le guide du groupe, Cocotte, Pomme (ce sont des pseudos, je ne me permettrais pas…), Esperiidae.

         Je voudrais rendre un hommage tout particulier à Victoria. J’ai gardé dans l’oreille sa voix chaude, un brin coquine, dont je me suis délecté dans plusieurs lectures : « Madame Bovary », « David Copperfield », « Pêcheur d’Islande », et, surtout, « Le journal d’une femme de chambre » d’Octave Mirbeau. Ce livre reste toujours invariablement en tête des livres audio les plus appréciés sur le site. Je n’oublierai pas cette femme de talent récemment décédée…

         Voilà… A vous de choisir votre prochaine lecture.

         Excellente fin d’année à tous, et de nombreux cadeaux dans la hotte du Père Noël.

     

                                                                                      Alain

     

  • Peintres femmes

    « Jusqu’à présent on n’attendait de leur pinceau que de l’agrément et de la propreté ; elles montrent aujourd’hui de la vigueur et de la noblesse. Elles sont enfin les dignes rivales de notre sexe, et les hommes qui s’étaient attribué sur elles toute la supériorité des talents, peuvent désormais craindre la concurrence » - Commentateur du Salon de 1783

     

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    Nisa Villers - Portrait de madame Soustras, 1802, Louvre

     

         L’exposition « Peintres femmes 1780-1830 » vient enfin d’ouvrir ses portes jusqu’au 4 juillet prochain au musée du Luxembourg à Paris.

         Le petit « carnet d’expo » aux pages cartonnées que je feuillète tient peu de place. L’air de rien, il réussit le tour de force en une soixantaine de pages de nous présenter ces peintres femmes, et non femmes peintres insiste Martine Lacas la commissaire de l’exposition. Des dépliants judicieusement insérés à l’intérieur permettent de visionner une vingtaine de tableaux en couleur et en font un magnifique petit livre pour découvrir l’exposition.

     

         Peu d’époques ont été aussi agitées dans notre histoire de France : 50 années, coincées entre l’Ancien Régime et la Restauration, en passant par la Révolution Française et l’Empire. Dans cette période, étonnement, les femmes en France vont occuper une place importante dans le monde des arts. Auparavant, celles-ci avaient accès aux professions artistiques, mais étaient vouées aux genres dits mineurs, comme les fleurs, les paysages ou des scènes de genre. Douées pour le beau, le décoratif, c’était tout ! La décence ne leur permettait pas le nu, surtout masculin, leur interdisant ainsi l’accès à la peinture d’histoire.

     

         1783 est la grande année pour deux peintres femmes exceptionnelles qui sont admises à l’Académie royale de peinture. La plus connue, la très jolie Elisabeth-Louise Vigée Le Brun, peintre officiel de la reine de France Marie-Antoinette dont elle fait de nombreux portraits, est déjà considérée à 28 ans comme une très grande portraitiste. Grâce à l’intervention de la reine, l’Académie royale de peinture la reçoit avec une peinture d’histoire, genre noble traditionnellement réservé aux hommes : une allégorie « La Paix ramenant l’Abondance », confirmant ainsi son appartenance officielle à l’élite artistique française comme peintre d’histoire. Le même jour, Adélaïde Labille-Guiard est également reçue à l’Académie.

     

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    Élisabeth-Louise Vigée Le brun - Marie Antoinette à la rose, 1783, Château de Versailles

     

         La révolution va tout chambouler. En 1793, L’Académie royale est remplacée par l’Institut. L’art n’est plus le monopole des élites fortunées. Cette démocratisation profite aux femmes qui s’engouffrent dans la brèche. Et ces dames sont nombreuses. Elles ont la possibilité d’étudier dans des ateliers d’élèves tenus non seulement par des femmes, comme celui de Labille-Guiard, mais aussi par des hommes comme Greuze ou David. Elles y étudient le dessin, copie des toiles anciennes et assistent à des séances de pose de modèles masculin et féminin. Ces lieux sont à la mode, permettant ainsi une mixité sociale entre les jeunes filles de la bonne société qui veulent apprendre la peinture. Catherine-Caroline Cogniet-Thévenin nous montre ses dames au travail :

     

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    Catherine-Caroline Cogniet-Thévenin - Atelier de jeunes filles, 1836, musée des beaux-arts Orléans

     

         On n’a jamais vu autant de femmes artistes. En ce début du 19e siècle, celles-ci sont présentes dans l’espace de création artistique. La féminisation des beaux-arts est devenu un fait. Comme les hommes, elles en font leur métier, reçoivent des prix et vendent leurs œuvres. Certaines osent même le grand genre de la peinture d’histoire mais préfèrent les portraits qui plaisent à un public plus ouvert au plaisir esthétique du « sentiment ». Non sans humour, Marie-Nicole Vestier se peint surveillant son bébé en tenant sa palette de peintre à la main :

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    Marie-Nicole Vestier - L'auteur à ses occupations,1793, musée de la Révolution française, Vizille

     

         Mais qui étaient ces femmes qui parvinrent à obtenir une reconnaissance et des succès commerciaux. Très nombreuses, je n’en citerais que quelques-unes. Elles sont toutes magnifiques :

    - Elisabeth Louise Vigée Le Brun, dont le superbe « Autoportrait de l’artiste peignant le portrait de l’impératrice Elisaveta Alexeevna » ouvre l’exposition.

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    Élisabeth-Louise Vigée Le brun - Autoportrait de l’artiste peignant le portrait de l’impératrice Elisaveta Alexeevna, 1800, musée de l’Hermitage, Saint Petersburg

     

    - Nisa Villers : « Portrait présumé de madame Soustras laçant son chausson », 1802. Ce portrait est l’affiche de l’exposition : un regard séducteur, une gorge claire mise en valeur par le noir de la robe, une cheville érotiquement découverte.

    - Adélaïde Labille-Guiard et son atelier :

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    Adelaïde Labille-Guiard - Autoportrait avec deux élèves, 1785, The Metropolitan Museum of Art

     

    - Hortense Haudebourt-Lescot fait régulièrement salon :

     

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    Hortense Haudebourt-Lescot - Portrait de l'artiste, musée du louvre, Paris

     

    - Marguerite Gérard, belle-sœur de Fragonard, peint des scènes de genre parfois voluptueuses :

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    Marguerite Gérard - L'élève intéressante, 1786, musée du Louvre, Paris

     

    - Rosalie Filleul de Besnes a 23 ans sur son « Autoportrait » peint en 1775. En 1794, elle abandonne la peinture après son mariage. Vigée Le Brun dans sa correspondance écrit : « Hélas ! je me souviens qu’au moment où j’allais quitter la France pour fuir les horreurs que je prévoyais, Madame Filleul me dit : « Vous avez tort de partir, moi je reste, car je crois au bonheur que doit nous procurer la révolution », « et cette révolution l’a conduite à l’échafaud ».

     

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    Rosalie Filleul de Besnes –Autoportrait, 1775, collection privée

     

         Personnellement, je retiendrais la belle toile de Marie-Guillemine Benoist, formée par Vigée Le Brun, connue pour son « Portrait d’une négresse » en 1800, renommé « Portrait d’une femme noire » ou « Portrait de Madeleine » qui est son chef-d’œuvre, considéré comme célébrant l’abolition de l’esclavage dans les colonies par la Révolution française. L’esclavage sera d’ailleurs rétabli par Napoléon en 1802.

     

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    Marie-Guillemine Benoist – Portrait d'une femme noire, 1800, musée du Louvre

     

         Toutes ces femmes de grand talent ont ouvert la voie. La féminisation moderne de l’espace artistique n’aurait pu avoir lieu sans ces pionnières de la fin du XVIIIe et des premières décennies du XIXème siècle.

     

     

  • Une éternelle jeunesse

     

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    Johannes Vermeer – Jeune fille à la perle, 1665, Mauritshuis, La Haye

     

     

         Tout en vous souhaitant une excellente année 2019, je tenais à débuter l’année par un sourire. Pas n’importe lequel, celui de cette jeune femme qui ne cesse de nous éblouir depuis si longtemps et dont on ne se lasse pas.

     

         Une lueur d’espoir vient de s’ouvrir pour les amateurs, comme moi, de très belles images d’œuvres d’art. Le célèbre musée du MAURITSHUIS à La Haye nous offre dorénavant le téléchargement libre en Haute Définition des œuvres de sa collection. Je viens d’obtenir La jeune fille à la perle en HD que je m'empresse de montrer ci-dessus. C’est du très haut niveau… Ne vous en privez pas.

         Le Mauritshuis rejoint ainsi les quelques grands musées dans le monde qui permettent déjà le libre téléchargement en HD de leurs images dont les droits d’auteur sont tombés dans le domaine public. La culture est au prix de la qualité des oeuvres que l'on peut voir et, une nouvelle fois, je cite cette superbe phrase de la National Gallery of Art à Washington :

    Le Musée croit que l'accès accru à des images de haute qualité de ses œuvres nourrit la connaissance, l'érudition et l'innovation, des utilisations inspirantes qui transforment continuellement la façon dont nous voyons et comprenons le monde de l'art.

     

     UNE TRÈS MAUVAISE NOTE : Le musée du Louvre est devenu en 2018 le premier musée mondial en nombre de visiteurs (plus de 10 millions). Malgré cela, il est toujours impossible, sans payer, d’obtenir des images en HD de ses œuvres, ainsi que celles des autres musées français. Personnellement, je n'ai pas encore réussi à en obtenir une, même en payant un prix que l'on ne m'a pas donné. Je réessaierai... 

     

     

         À La vue si touchante de cette Jeune fille à la perle, merveilleuse création de Johannes Vermeer, j'ai tenté de relever mon niveau. Pas facile... Durant les fêtes j'ai écrit le poème qu'elle m'a inspiré et que je vous offre ci-dessous :

     

     

    Bouche humide entrouverte, yeux brillants, 

    Regard caressant.

    Deux perles de lumière rose

    Aux commissures des lèvres, se posent.

     

    La jeune femme me fait face, souriante

    Dans l’éclat de sa jeunesse insolente.

    L’aurai-je dérangée ? 

    Mon rythme cardiaque s’est accéléré.

     

    Son regard croise le mien.

    Il irradie, me retient.

    Son souffle est parfumé,

    Va-t-elle me parler ?

     

    Aériennes, fluides, lisses,

    En glacis superposés, les couleurs glissent

    Vers cette fabuleuse lumière

    Qui n’appartient qu’à Vermeer.

     

    Dans cette figure lumineuse aux contours indécis.

    Galbe de la joue, bouche, nez, semblent imprécis.

    Faut-il compléter les parties manquantes 

    Laissées dans cette peinture fascinante ?

     

    Poussière de perles écrasées,

    Peau douce immaculée,

    Etrange turban exotique dont les plis frémissent,

    À qui appartint-il jadis ?

     

    Qui peut être cette femme troublante

    Une fille de Delft, une jeune servante ?

    Beauté irréelle au visage précieux, fragile,

    Sous son oreille, une perle brille.

     

    Par ce portrait hors du temps

    L’artiste nous transporte habilement

    Bien au-delà de l’apparence,

    Au-delà même de notre propre existence.

     

     

     

  • La petite fille au ruban bleu

     

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    Auguste Renoir - Portrait de Mademoiselle Irène Cahen d'Anvers, 1880, Fondation Bührle, zürich

     

     

         Pour la première fois, samedi soir, j’ai vu à la télévision ce magnifique portrait d’Auguste Renoir peint en 1880, la même année que le fameux Déjeuner des canotiers dont j’ai déjà parlé dans d’autres articles.

         Imaginez le plaisir que j’ai ressenti devant la qualité de ce portrait qui m’a rappelé par certains côtés la Jeune fille à la perle de Johannes Vermeer, peinte elle aussi légèrement de trois quart avec cette même fraîcheur de coloris.

         Je vous donne quelques détails sur l’œuvre :

     

    Mise au ban, cachée puis spoliée durant la Seconde Guerre mondiale, «La Petite Fille au ruban bleu», peinte par Auguste Renoir en 1880, livre ses secrets et ceux de son modèle Irène Cahen d'Anvers. La toile est intimement liée aux heures les plus sombres de la France de la première moitié du XXe siècle. Bientôt exposée à la Kunsthaus à Zürich, le chef-d'oeuvre fait partie des pièces maîtresses de la Collection Emile Bürhle, une collection exceptionnelle mais très controversée. L'exposition de ce tableau de Renoir mondialement reconnu fait encore aujourd'hui ressurgir les fantômes du passé et révèle l'histoire qui se cache derrière.

     

         Pour ceux qui veulent revoir l’excellente émission TV visible jusqu’au 7 décembre prochain, je donne le lien :

     

    https://www.france.tv/documentaires/art-culture/1113769-renoir-et-la-petite-fille-au-ruban-bleu.html

     

         Le plus étonnant est que j’ai retrouvé un autre tableau du même Renoir que je connaissais, daté de 1888, nommé La jeune fille au ruban bleu dont le motif n’est guère éloigné du premier portrait :

     

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    Auguste Renoir – La jeune fille au ruban bleu, 1888, Musée des Beaux-Arts, Lyon

     

     

         Que c’est beau Renoir !

     

     

     

     

  • Léonard et la Sainte Anne

     

         Nous sommes à dix jours de la prochaine grande exposition LÉONARD DE VINCI organisée par le musée du Louvre à partir du 24 octobre prochain.

         En avant-goût de l’exposition, je reviens sur la magnifique exposition qui se tint au Louvre en 2012 : LA SAINTE ANNE – L’ultime chef-d’œuvre de Léonard de Vinci.

         Elle venait d’être restaurée.

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    Léonard de Vinci – Sainte Anne, la vierge et l’enfant (après restauration en 2012), 1503-1519, musée du Louvre, Paris

     

     

    UN RENONCEMENT PUIS UNE DÉCISION

         La Vierge à l’Enfant avec Sainte Anne est l’une des trois toiles que Léonard de Vinci apporta avec lui lors de sa venue en France en 1516.

         L’œuvre de Léonard occupe une place unique dans l’art occidental. Exposé à une pression publique et médiatique, le musée du Louvre avait renoncé en 1994 à engager le travail de restauration sur la Sainte Anne.

         Devant l’état de dégradation de l’œuvre, et la connaissance de nouvelles techniques scientifiques, la restauration est enfin décidée en 2011. Le résultat allait s’avérer exceptionnel comme j’ai pu le constater en visitant en 2012 cette exposition consacrée à la renaissance de ce chef-d’œuvre.

     

    UN PEU D’HISTOIRE

         Au tout début du Cinquecento, le thème de la Sainte Anne trinitaire est très répandu à Florence. Léonard jouit d’une immense réputation après l’exécution de l’extraordinaire Cène peinte pour le réfectoire du couvent dominicain de Santa Maria delle Grazie. Elle est aujourd'hui très dégradée.

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    Léonard de Vinci – La cène, 1498, Santa Maria delle Grazie, Milan

     

         En 1501, l’artiste a déjà en tête ce thème sur lequel il méditera jusqu’à la fin de ses jours. Deux ans plus tard, l’œuvre est commencée, dans le même temps que la fameuse Monna Lisa, la Joconde.

         Pour sa plus grande partie, la toile est certainement peinte au cours du séjour milanais de Léonard entre 1508 et 1513, avant son départ pour Rome travailler pour Julien de Médicis.

         Il continuera à oeuvrer dessus, ainsi que sur les deux autres tableaux, la Joconde et le Saint Jean-Baptiste, apportés avec lui lors de sa traversée des Alpes pour la France à l’automne 1516. Sur l’invitation de François 1er, Léonard s’installe au manoir du Clos-Lucé, près d’Amboise, où il décèdera au printemps 1519.

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    Château du Clos-Lucé, Amboise

     

    LE COMMANDITAIRE

         Qui est le commanditaire de la « Saint Anne » ?

         Il n’y a aucune certitude à ce sujet : le roi de France Louis XII dont le thème de la Sainte Anne aurait pu honorer son épouse Anne de Bretagne ; Isabelle d’Este ; César Borgia ou un mécène italien. On pense même que Léonard, par défi pictural dont il était coutumier, aurait pu, de sa propre initiative, se lancer dans le processus de création du tableau.

     

    L’OEUVRE

         Léonard manque de temps…

         Une quinzaine de dessins préparatoires aux figures sont connus.

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         Curieux de tout, il se préoccupe d’ingénierie militaire et de recherches diverses sur l’hydraulique, l’architecture, la géologie, les mathématiques ou l’anatomie du corps humain. Son activité artistique passe parfois au second plan malgré les nombreuses commandes qui restent souvent inachevées, ou ne se terminent jamais, comme l’importante fresque murale « La bataille d’Anghiari » commandée pour la salle du Grand Conseil du Palazzo Vecchio de Florence.

     

         Cette Sainte Anne, trinité terrestre, est une scène familiale. L’oeuvre peut être vue comme une synthèse des préceptes artistiques en peinture de l’artiste : rendu vaporeux des corps en clair-obscur, entrelacement des postures variées, analyse psychologique des visages.

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         L’intériorité des personnages a tout particulièrement intéressée le maître : la Vierge est assise sur les genoux de sa mère Sainte Anne qui abaisse son regard avec ce sourire bienheureux si cher à Léonard. Elle se penche tendrement et saisit dans ses bras l’enfant Jésus, comme pour l’éloigner de l’agneau avec lequel il joue qui symbolise son futur sacrifice.

     

    LA RESTAURATION

         Lors de mes précédentes visites au Louvre, ce chef-d’œuvre m’apparaissait défraichi, terne, envahi de retouches de vernis anciennes ayant fait disparaître les contrastes, décolorées les couleurs.

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         En 2012, en visitant l’exposition du Louvre après la restauration de la Sainte-Anne, je suis resté scotché longtemps devant cette nouvelle Sainte Anne qui m’apparaissait telle que la voyait Léonard avant de mourir. Je découvrais l’art pictural de la maturité de l’artiste.

         La toile, construite sur d’imperceptibles transitions de lumière et d’infimes variations de couleur, avait retrouvée ses transparences dans les robes et les voilages, ses teintes vives et froides. Les bleus de lapis-lazuli et les rouges violacés s’exprimaient à nouveau. L’exquis modelé des figures enfouis sous d’épaisses couches de vernis jaunâtres apparaissait dans son état de fraicheur initial.

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         Cette merveille est, à mes yeux, la plus belle des cinq toiles que possède le Louvre aujourd’hui. Celles-ci seront l’élément central de la prochaine exposition LÉONARD DE VINCI qui s’annonce dans une dizaine de jours.

     

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  • Hommage à Claude Monet

     

     

      Monet - la grenouillère 1869metropolitan new york.jpg                           Claude Monet – La Grenouillère, 1869, Metropolitan Museum of Art, New York

     

     

           Claude Monet est à l’honneur ces temps-ci à Paris où plusieurs expositions temporaires sont consacrées au chef de file du mouvement impressionniste français. Louvre-passion a d’ailleurs parlé récemment de celle qui a lieu actuellement au musée Rodin : "Monet-Rodin".

          On peut d’ailleurs contempler en permanence les toiles du peintre toute l’année à Paris aux Musées d’Orsay, Marmottan, et de l’Orangerie dont les Nymphéas sont la grande fierté.

          Je me suis rendu le mois dernier à la superbe exposition qui se tient jusqu’au 24 janvier prochain au Grand Palais à Paris : "Claude Monet (1840-1926)".

          Je ne peux que conseiller à ceux qui peuvent s’y rendre d’y courir sans tarder. Les salles regroupent 175 œuvres qui permettent de revoir en l’espace de deux bonnes heures, voire plus si on aime... toute l’œuvre du peintre : du Déjeuner sur l’herbe de ses débuts, en passant par ses Cathédrales, ses Parlements de Londres dans le brouillard, les côtes normandes, les paysages d’Argenteuil, sans oublier les reflets mêlant l’eau et le ciel des bassins de Giverny. Du grand spectacle !

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                Claude Monet – Terrasse à Sainte Adresse, 1867, Metropolitan Museum of Art, New York

         

     

          Je prépare en ce moment un récit en plusieurs épisodes parlant des premières années de la carrière de Claude Monet à travers l’image de sa femme, la compagne des années difficiles : la douce et discrète Camille.

          Celle-ci était son modèle préféré. Elle est représentée dans une grande quantité de tableaux de Monet, des plus célèbres aux moins connus. Elle inspira souvent des amis du peintre comme Manet ou Renoir.

          Je pense pouvoir publier le premier épisode de cette histoire vers le début du mois de décembre. Tiens c’est la période des fêtes !

          A bientôt.

     

                                                                               Alain

      

     

          Peut-être ces quelques mots supplémentaires paraîtront déplacés à la suite de ma note du jour.

          J'ai éprouvé de l'émotion en apprenant le décès de Myriam qui était l'auteur du blog Bleu de Cobalt. Comme je le dis à son mari, je percevais dans ses mots une femme de coeur et d'esprit.

          Je ne sais si elle a eu le temps de voir l'exposition Monet du Grand Palais dont elle parlait le mois dernier et qui l'aurait certainement passionnée.

          J'ai toujours pensé que l'art nous permettait de nous élever... d'aller plus loin... Un ailleurs qu'elle a dû atteindre.