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Rechercher : un pastelliste heureux

  • 2. Maurice Quentin de La Tour, prince du pastel

     

         A la suite de ma visite au Louvre de la superbe exposition « PASTELS du musée du Louvre 17e et 18e siècles », et après un premier article sur Rosalba Carriera dont la venue à Paris en 1720 lança la mode du pastel en France au 18e siècle, je consacre le présent article au plus célèbre des pastellistes français Maurice Quentin de la Tour qui s’inspirera beaucoup de la vénitienne.

     

    « Que d’attentions, que de combinaisons, que de recherches pénibles pour conserver l’unité de mouvements malgré les changements que produit sur la physionomie et dans les formes la succession des pensées et des affections de l’âme ! »

     

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    Maurice Quentin de La Tour – Autoportrait à l’œil-de-bœuf ou à l’index, 1737, musée du Louvre, Paris

     

     

         A la suite de son agrément le 25 mai 1837 à l’Académie royale de peinture pour plusieurs de ses ouvrages, dont celui de Voltaire, l’Académie demande à Maurice Quentin de La Tour différents portraits comme morceaux de réception. Cinq pastels seront exposés au Salon de 1738 dont celui de mademoiselle de la Boissière.

        Dans une lettre, ci-dessous, de septembre 1738 à une marquise « Description raisonnée des tableaux exposés au Louvre », le chevalier Noeufville de Brunaubois-Montador décrit avec talent ce qui caractérise la peinture de ce pastelliste encore peu connu et qui va le distinguer de la plupart des autres pastellistes du siècle : ne pas se contenter de fixer la ressemblance mais laisser apparaître l’âme du modèle.

    « Quelque admiration qu’on ait donné à tout ce dont je viens de vous entretenir, Madame ; il faut en redoubler à la vue des Pastels de M. La Tour. Il en a produit cinq. C’est la nature même pour la vérité de la ressemblance. (…)

    De même que celui de Melle La Boissière, à laquelle il a su conserver toutes les grâces qu’on lui connaît, et qui, sans la rendre belle, lui donnent le triomphe sur la beauté. Son attitude est aisée, naturelle, et artistement négligée. Elle est appuyée sur une fenêtre, les mains passées dans un de ces petits manchons, que vous avez pris en déplaisance, mais avec lesquels vous vous réconcilierez en faveur de celui-ci. Rien n’est plus léger et plus spacieux que sa Touche. On voit, on sent, on croit aller toucher tout ce qu’il peint. C’est du velours, c’est une pelisse, c’est de la gaze ; il n’est pas possible que ce ne soit qu’une imposture de couleurs. »

     

         La demoiselle à 16 ans, un sourire malicieux. Les yeux noirs semblent se moquer du peintre en train de la portraiturer.

     

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    Maurice Quentin de La Tour – Marie-Louise Gabrielle de La Fontaine Solare de La Boissière, 1738, musée du Louvre, Paris

     

      

        Qui est cette jeune religieuse aux yeux bleus ? Serait-elle un membre de la famille de Maurice Quentin de La Tour ? Elle semble surprise, peinture,louvre,quentin de la tourdérangée, en train de feuilleter un livre de musique. L’artiste a déposé un point blanc, comme une goutte, sur la pointe du nez accrochant la lumière.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

        

    Maurice Quentin de La Tour – Portrait de religieuse, 1740, musée du Louvre, Paris

     

         L’artiste eut beaucoup de mal à obtenir du roi Louis XV quelques séances de pose.

    Belle prestance, ce monarque !peinture,,louvre,quentin de la tour

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

      

     Maurice Quentin de La Tour – Louis XV, roi de France, 1748, musée du Louvre, Paris

     

         Toute la qualité des pastels de La Tour apparaît dans ce portrait. De cette épouse de Louis XV, qui se sait pas très belle, il fait un portrait exceptionnel. La qualité technique de la robe à damiers et rubans est superbe mais l’essentiel est dans la représentation que l’artiste fait de la reine. Tous ceux qui voyaient ce tableau le considéraient comme un chef-d’œuvre. Contrairement à d’autres peintres qui avaient peint la reine, La Tour, dans les gestes, l’ovale de la figure avec un large front, cet air affable, avait su exprimer la gentillesse, la bonté qui se dégageait de cette femme de 45 ans.

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    Maurice Quentin de La Tour – Marie Leszcynska, reine de France,1745, musée du Louvre, Paris

     

     

         Les personnes que la technique du pastel intéressent retiendront la confession que Quentin de la Tour fit au marquis de Marigny en 1763 sur la difficulté de peindre des portraits au pastel :

     

    « (...) C’est un nouveau portrait à chaque changement ; et l’unité de lumière qui varie et fait varier les tons de couleurs suivant le cours du soleil et le temps qu’il fait ! Ces altérations sont d'autant plus perfides qu'elles arrivent insensiblement. Un homme dévoré de l’ambition de son art est bien à plaindre d’avoir à combattre tant d’obstacles.

    Le pastel, Monsieur le Marquis, en fournit encore d’autres, tels que les poussières, la faiblesse de certaines couleurs. Jamais un ton juste, être obligé de faire les teintes sur le papier et de donner plusieurs coups avec différents crayons au lieu d’un, risquer d’altérer le mérite de la touche et de n’avoir point de ressources si l’esprit en est ôté. A l’huile, les teintes se font au bout du pinceau, la touche reste pure, et quand on a le malheur d’avoir gâté son ouvrage, il est facile, en effaçant sa faute, de retrouver ce qui était en dessous.

    (…)

    Il faudrait être à ma place pour sentir les efforts que je fais pour mettre une figure et une tête ensemble dans les règles de la perspective. Les angles sont si courts que la personne qu’on peint de près ne peut pas regarder des ses deux yeux à la fois l’oeil du peintre. Ils vont et viennent sans jamais être ensemble. C’est pourtant de leur parfait accord que résultent l’âme et la vie du portrait. De la naissent les inquiétudes qui occasionnent tant de changements qu’ils font passer le malheureux peintre pour fou ou tout au moins capricieux, fantasque… »

     

         En 1753, La Tour fit le portrait de Jean Le Rond d’Alembert, homme de lettre. Une fois de plus, le peintre avait su saisir l’esprit du personnage. Comment ne pas ressentir l’intelligence de ce scientifique qui entrait à l’Académie des sciences à l’âge de 23 ans, et publiait à 30 ans, associé avec Denis Diderot, L’Encyclopédie dont il rédigea le discours préliminaire.

     

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    Maurice Quentin de La Tour – Jean Le Rond d’Alembert, 1753, musée du Louvre, Paris

     

         La Tour peint pour la première fois un enfant. Le tout jeune prince, futur Louis XVIII, a belle allure sous le crayon de l’artiste.peinture,,louvre,quentin de la tour

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

        

    Maurice Quentin de La Tour – Louis Stanislas Xavier, comte de Provence, futur Louis XVIII, 1762, musée du Louvre, Paris

     

      En 1761 La Tour ne représente pas en peintre son vieil ami Chardin mais peinture,louvre,quentin de la touren bourgeois élégant, la perruque poudrée, l’air satisfait du nouveau trésorier chargé de l’accrochage du Salon de l’Académie.

         Chardin va garder le tableau jusqu’en 1774, année où il démissionne de sa charge de trésorier pour des raisons de santé. Il fait savoir à l’assemblée qu’il serait flatté que l’Académie accepte de placer le portrait de La Tour dans l’Académie, ce qui se fera en présence de Chardin en 1775. En 1797 il sera l’un des tout premiers pastels exposé dans le nouveau musée.

     

     

    Maurice Quentin de La Tour – Jean-Baptiste Siméon Chardin, 1760, musée du Louvre, Paris

     

     

         J’ai gardé pour la fin de mon article l’œuvre la plus célèbre des pastels du 18e en France peint par Maurice Quentin de La Tour : la marquise de Pompadour.

         A l’occasion de l’exposition du Louvre une importante restauration du tableau a été faite et a permis d’en savoir davantage sur l’œuvre peinte entre 1752 et 1755 à la suite d’une commande de la marquise. Le grand tableau présent dans l’exposition est magnifique et semble avoir gardé sa fraicheur du jour de sa présentation au Salon de 1755.

     

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    Maurice Quentin de La Tour – Jeannne Antoinette Lenormant d’Étiolles, marquise de Pompadour, 1755, musée du Louvre, Paris

     

     

        Compte tenu du format exceptionnel du portrait, La Tour n’obtint de la marquise peinture,louvre,quentin de la tourque quelques séances de travail en sa présence afin de fixer le plus important : les traits du visage. Ainsi, l’artiste pouvait terminer le tableau dans le calme de son atelier. Trois préparations du visage ont été retrouvées dans le fonds d’atelier du maître. Le peintre avait apparemment une idée précise de l’orientation qu’il comptait donner au modèle.

     

     

     

     

         L’artiste avait une technique bien à lui qu’il utilisait parfois pour les grands formats afin de ne pas importuner le modèle en le laissant poser trop longtemps. La Tour prépara le portrait en pied dans son atelier sur huit grandes feuilles de papier bleu superposées pour obtenir la surface voulue. Une feuille de papier fut ensuite collée à l’emplacement prévu pour le visage et le buste de la marquise. Puis, s’inspirant de sa meilleure étude de visage, il put mettre en couleur la feuille collée en la chargeant de pastel pour la raccorder à l’ensemble et permettre de dissimuler les contours de l’empiècement.

         Il s’agit là d’un travail d’une grande précision dans lequel le peintre excellait. Il fit peinture,louvre,quentin de la tourplusieurs autres modifications : la main droite fut reprise.

     

     

     

     

     

     

     

         Il retravailla le pied gauche du modèle qui ne lui convenait pas.peinture,,louvre,quentin de la tour 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

         Sur la console l’emplacement de l’Encyclopédie qui se trouvait auparavant plus à peinture,louvre,quentin de la tourgauche fut modifié. La Tour prenait un risque en provoquant le roi qui n’aimait pas ce livre dont les premiers volumes avaient été interdits en 1752 car certains textes défendaient des idées contraires à la religion et à l’autorité des rois. L’interdiction avait été levée en 1754. Peut-être l’idée de mettre le livre à la hauteur de la tête de la marquise venait-elle de celle-ci qui manifestait ainsi sa liberté de penser.

     

       Lorsque l’œuvre fut présentée au Salon de 1755 elle divisa les amateurs pour la beauté de la toile ou pour la non-acceptation de l’Encyclopédie figurant en bonne place derrière la marquise.

  • 1/2 - Elisabeth Vigée Le Brun : Souvenirs

     

    A cette époque de ma vie, j’étais laide. J’avais un front énorme, les yeux très enfoncés ; mon nez était le seul joli trait de mon visage pâle et amaigri. En outre j’avais grandi si rapidement qu’il m’était impossible de me tenir droite, je pliais comme un roseau.

    […]

    Mademoiselle Boquet avait alors quinze ans et j’en avais quatorze. Nous rivalisions de beauté (car j’ai oublié de vous dire, chère amie, qu’il s’était fait en moi, une métamorphose et que j’étais devenue jolie).

     

     

         Depuis le 23 septembre dernier, à travers plus de 150 œuvres, le Grand Palais à Paris rend hommage à Elisabeth Vigée Le Brun en lui consacrant la première rétrospective de ses oeuvres en France.

         Cette femme-peintre exceptionnelle est considérée peinture,vigée le brun,grand palais,portraitscomme un des plus grands portraitistes du 18ème siècle. Née en 1755, fille du peintre pastelliste Louis Vigée, elle commence tôt à peindre. Son père se rendant compte de sa sensibilité artistique lui dira : « Tu seras peintre mon enfant, ou jamais il n’en sera ». A 23 ans, son talent lui permet de devenir le peintre officiel de la reine de France Marie-Antoinette dont elle fait de nombreux portraits. Grâce à l’intervention de celle-ci, en 1783, l’Académie royale de peinture la reçoit et confirme ainsi son appartenance officielle à l’élite artistique française. En 1789, les vents mauvais de la révolution l’obligent à s’exiler. Voyageant à travers toute l’Europe, de cour en cour, célèbre, elle ne cesse de peindre les grands de cette époque. En 1802, revenue en France, elle continue à peindre jusqu’à son décès en 1842, âgée de 87 ans. Ses « Souvenirs », écrits durant les douze dernières années de sa vie, seront ses ultimes mémoires ou autobiographie qui pourrait être son dernier portrait.

     

         Je montre aux lecteurs quelques œuvres parmi celles que j’ai le plus appréciées. Pour la plupart, celles-ci ont été peintes avant l'arrivée à Rome de l'artiste alors âgée de 34 ans, à la toute fin de l’année 1789. 

         Maintenant, laissons la place aux souvenirs…

     

     

     

    Nous revînmes en Flandre revoir les chefs-d’œuvre de Rubens. Je trouvai chez un particulier le fameux « Chapeau de paille ». Cet admirable tableau représente une femme de Rubens ; son grand effet réside dans les deux différentes lumières que donnent le simple jour et la lueur du soleil. Ainsi les clairs sont au soleil ; et ce qu’il me faut appeler les ombres, faute d’un autre mot, est le jour. Ce tableau me ravit et m’inspira au point que je fis mon portrait à Bruxelles en cherchant le même effet. Je me peignis portant sur la tête un chapeau de paille, une plume, une guirlande de fleurs des champs, et tenant ma palette à la main. Quand le portrait fut exposé au salon, j’ose vous dire qu’il ajouta beaucoup à ma réputation.

     

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    Elisabeth Vigée Le Brun – Marie-Antoinette en grand habit de cour, 1778, Kunsthistoriches museum, Vienne

     

    J’ai fait successivement à diverses époques plusieurs autres portraits de la Reine. Ces portraits étaient donnés à ses amis ou à des ambassadeurs. Un entre autres la représente coiffée d’un chapeau de paille et habillée d’une robe de mousseline blanche dont les manches sont plissées en travers, mais assez ajustées : quand celui-ci fut exposé au salon, les méchants ne manquèrent pas de dire que la reine s’était fait peindre en chemise ; car nous étions en 1796, et déjà la calomnie commençait à s’exercer sur elle.

     

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     Elisabeth Vigée Le Brun – Marie-Antoinette en chemise ou en gaulle, 1783, Hessische Hausstifung, Kronberg

    A suivre.....

  • Un anversois à Paris - Jacques Jordaens (1593-1678)

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    Jacques Jordaens –  La famille du peintre, 1622, musée du Prado, Madrid

     

         Pourquoi Jacques Jordaens n’a-t-il jamais connu de grande rétrospective de son œuvre à Paris et en France ?

         Parmi les trois grands peintres anversois du 17ème siècle, Rubens serait-il le génie, Van Dyck le surdoué mort jeune en pleine gloire, et Jordaens un homme simple, bon vivant, jouisseur volontiers vulgaire dans ses représentations de banquets de famille ?

         La France qui possède dans ses musées, notamment au Louvre, de nombreuses toiles du maître, a décidé de rendre à Jacques Jordaens la place qui lui revient parmi les célébrités de la peinture flamande du 17: plus de 120 œuvres venues du monde entier sont encore actuellement présentes, jusqu’au 19 janvier 2014, au Petit Palais à Paris.

         A travers une douzaine de toiles, je montre celles qui me sont apparues les plus représentatives du travail de ce peintre excellant dans tous les types de peinture de cette époque.

     

    RELIGION ET MYTHOLOGIE

     

         Converti au Calvinisme, Jordaens travailla constamment, jusqu’à la fin de sa vie, pour peinture,écriture,jordaens,anversl’église, qu’elle soit protestante ou catholique.

         Peter Paul Rubens, figure tutélaire de la peinture flamande, sera une référence constante pour Jordaens qui travailla dans son atelier.

         Celui-ci n’a que 23 ans lorsqu’il peint cette « Adoration des bergers » dans laquelle le traitement des personnages et des carnations sont fortement inspirés d’exemples rubéniens : dans les demi-teintes, les nuances gris bleutés du visage de la Vierge contrastent avec l’ambiance rouge orangé environnante, lui donnant vie.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Jacques Jordaens –  L’Adoration des bergers, 1617, musée de Grenoble

     

     

         Sa famille : le peintre prend souvent sa femme, son fils et ses deux filles pour modèles. Dans cette toile, son épouse Catharina est représentée tenant dans ses bras une de sespeinture,écriture,jordaens,anvers filles, la petite Elisabeth à la physionomie expressive encadrée de boucles blondes. L’influence de l’italien Caravage apparaît nettement dans l’éclairage des personnages, lumineux, se détachant sur un fond sombre.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Jacques Jordaens –  Sainte famille, 1620, City Art Gallery, Southampton

     

         Contrairement aux représentations habituelles des saints, ceux-ci n’ont aucun attribut d’évangéliste. Le peintre nous montre des hommes ordinaires, rudes. Peut-être de simples paysans ? Seul reconnaissable, le jeune homme au centre de la toile en blanc ne peut être que le disciple Jean, toujours représenté jeune et imberbe.

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    Jacques Jordaens –  Les quatre évangélistes, 1628, musée du Louvre, Paris

     

         Cette étude exprimant la terreur de cette femme est une esquisse de réflexion pour peinture,jordaens,anversun tableau d’autel de grande dimension : « Le Martyre de sainte Apolline » destiné à l’église des Augustins d’Anvers. Cette dernière toile fut la seule commande destinée aux trois autels de l’église pour laquelle les trois artistes les plus importants d’Anvers aient collaboré en même temps : Rubens, Van Dyck et Jordaens.

     

     

     

     

     

     

     

     

    Jacques Jordaens –  Etude de tête pour sainte Apolline, 1628, Staatsgalerie, Stuttgart

     

         Joardens multiplie les figures d’apôtre d’après des études d’après nature. Le peintrepeinture,écriture,jordaens,anvers fait de ce vieil homme (peut-être saint Pierre ?) un portrait au faciès particulièrement expressif.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Jacques Jordaens –  Figure d’apôtre, 1621, musée des Beaux-Arts, Caen

     

         Je les connais bien ces vaches ! Je les retrouve ici par hasard ! Elles inspirèrent Van Gogh qui en peindra une interprétation personnelle l’année de sa mort en 1890.

         Dans les œuvres mythologiques ou bibliques, les animaux tiennent un rôle important, et tout particulièrement dans les toiles de Jordaens. Il a croqué « sur le vif » cette étude de vaches dans une manière directe et énergique qui ne pouvait qu’inspirer Van Gogh.

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    Jacques Jordaens –  Cinq études de vache, 1620, Palais des Beaux-Arts, Lille

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    Vincent Van Gogh - Les vaches (d’après Jordaens), 1890, Palais des Beaux-Arts, Lille

     

         Que ne ferait pas Cléopâtre pour conquérir un homme…

         Durant le banquet offert à Marc Antoine, la reine d’Egypte aurait sacrifié une énorme perle héritée de ses ancêtres en la faisant dissoudre dans une coupe de vinaigre. Elle la but ensuite remportant ainsi son pari fait avec Marc Antoine de folle dépense au cours du repas.

         Jordaens nous montre cette scène de façon burlesque. Un bouffon hilare dénonce la vanité des protagonistes.

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    Jacques Jordaens –  Le banquet de Cléopâtre, 1653, musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg

     

     SCENES DE GENRE – REPRESENTATION DU QUOTIDIEN

     

         Pétris de culture humaniste, Jordaens savait, en bon disciple d’Horace, qu’on n’apprend jamais mieux aux hommes à réformer leurs tares et leurs ridicules qu’en les divertissant. Il se régalait toujours à peindre des scènes de festivités qu’il multipliait en grand nombre.

     

         Difficile d’imaginer une fête de l’Epiphanie plus assourdissante !

         Dans le cartouche du fond est marqué : « In een vry gelach ist goet gast syn », c'est-à-dire « Où la boisson est gratuite, il fait bon être invité ». Tous à moitié ivre, les invités semblent d’excellents convives. Lorsque le roi au centre lèvre son verre, la compagnie l’imite en criant « Le roi boit ! ».

         Cette version du « Roi boit » est particulièrement triviale : une femme essuie les fesses de son enfant ; Jordaens, au premier plan, se caricature sous les traits déformés d’un convive vomissant et renversant un guéridon de vaisselle… La galette ne semble pas encore entamée, comment seront les invités à la fin de la fête ?

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    Jacques Jordaens –  Le roi boit !, 1640, Musées royaux des Beaux-Arts, Bruxelles

     

         Ce thème, comme celui du « Roi boit », est souvent représenté dans les toiles flamandes ou hollandaises. Des jeunes et des vieux festoient en chantant. Le cartouche derrière Jordaens, montré en train de jouer de la cornemuse, indique : « Ut Genus Est Genius Concors Consentus ab ortu », soit « L’esprit de l’enfant se conforme dès la naissance à celui de sa race ». Ce genre de tableau pouvait avoir plusieurs significations, dont celle-ci s’apparentant aux vanités : « La vie est transitoire et les générations se succèdent sans parvenir à tirer les enseignements de celles qui les ont précédées ».

      

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    Jacques Jordaens –  « Comme les vieux ont chanté, ainsi les jeunes jouent de la flûte » (Les jeunes piaillent comme chantent les vieux), 1645, musée des Beaux-Arts, Valenciennes

     

         Serait-ce la mère de l’artiste ?peinture,écriture,jordaens,anvers

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Jacques Jordaens –  Deux études de tête de vieille femme, 1618, musée des Beaux-Arts, Nancy

     

         Charmante jeune fille !

     peinture,jordaens,anvers    Dans de nombreuses toiles, Jordaens montre le minois et la chevelure rousse de cette jeune femme. Il s’agit de sa fille aînée Elisabeth âgée d’une vingtaine d’années. Elle tourne légèrement sa tête vers son père dans une moue de complicité tendre.

         Elisabeth  ne se décidera jamais à se séparer de ce père avec qui elle vivra toute sa vie, et décédera, le même jour que lui, d’une épidémie à Anvers.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Jacques Jordaens –  Portrait d’une jeune dame montrant un bijou, 1639, Gemäldegalerie der Akademie der bildenden, Vienne

     

         J’ai eu un vrai coup de cœur pour cette toile.

         La servante qui nous regarde avec un sourire entendu semble être située dans le même espace que les deux amants. Serait-ce les deux mêmes femmes se faisant face, l’une dans la réalité, l’autre dans un monde féerique ?

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    Jacques Jordaens –  Servante avec une corbeille de fruits et un couple d’amoureux, 1630, Glasgow Museums, Glasgow

     

     

         En 1905, pour le 75e anniversaire du pays, l’Etat belge s’appropria Jordaens en l’identifiant à son « peuple » et, en 1953, Léo Van Puyvelde, Conservateur en Chef des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, écrivit :

         « Jordaens concrétise véritablement le sain équilibre, l’activité inlassable de la classe bourgeoise flamande de son temps. Il en en gardera d’ailleurs toujours la mentalité un peu terre à terre. »

     

     

     

  • Le Clos Normand, un jardin à Giverny - MONET Claude, 1900

     

    La maison rose

     

     

     

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         Au moins 300 mètres de queue… Une bonne heure d’attente… J’en étais sûr… Giverny c’est l’enfer !

       Pourtant, je m’arrange toujours pour y aller en semaine. Je repère une journée où la météo est favorable. Le casse-croûte, la bouteille d’eau et c’est parti. Une heure et demie de route, les boucles de la Seine, Vernon, le pont sur la droite qui enjambe le fleuve. Une petite route serpente ensuite directement jusqu’au vaste parking du musée.

         Je suis arrivé sur le coup de midi. La bonne heure… Et voilà le résultat ! Je me retrouve dans une file indéfinie, coincé entre un groupe de scolaires allemands qui me hurlent dans les oreilles et des japonais bardés de caméscopes et appareils photos miniatures. Les gens du « Soleil levant » arborent un sourire zen qui m’irrite.

         Je me résigne à une attente forcée. Des accents américains que je connais bien arrivent jusqu’à moi. Ces américains… Il y a toujours une flopée de touristes américains à Giverny. Ils font coup double : ils visitent le Musée d’Art Américain et se rendent ensuite à la maison de Monet située à peine 200 mètres plus loin.

         Je repense à la photo…

         Il y a un instant, je déambulais tranquillement sur le petit chemin bordé de fleurs qui mène à la maison de l’artiste, lorsqu’une jeune américaine, un reflex Canon en main, m’avait apostrophé dans un français imprécis :

         - Pouvez-vous faire photo devant maison de Monet ?

        Interloqué, je m’étais demandé pourquoi elle était plantée devant une vieille bicoque en ruine. Dans mon meilleur anglais, j’avais essayé de lui faire comprendre son erreur :

         - It is not the Monet’s house ! The good one is one hundred meters over there.

         - Non ! Je suis sûr ! C’est vraie maison !

         La pauvre ! Elle était certaine que la maison de Monet ne pouvait, compte tenu de son ancienneté, qu’être délabrée, au bord de l’effondrement, et non la belle maison soigneusement crépie de rose devant laquelle je poirotais actuellement. Devant son obstination, je n’avais pas insisté, avais saisi l’appareil photo et l'avais immortalisée devant la ruine. De toute façon, le souvenir restera le même et ses futurs enfants ne verront pas la différence sur la photo… Ces américains, je les adore !

         La file a pas mal avancé. J’entre enfin dans le musée, requinqué.

         - Messieurs dames, nous sommes désolés de vous faire savoir que le jardin d’eau est fermé pour travaux. Le ticket de l’entrée n’est valable que pour le jardin de fleurs.

         Un homme en chemisette d’un bleu délavé envoie cette annonce à chaque visage qui s’encadre dans la porte d’entrée. Les japonais n’ont rien compris à l'annonce et sourient toujours béatement. Les allemands se marrent, indifférents.

        Lamentable… J’ai attendu plus d’une heure pour ça…  Dire que je viens essentiellement pour revoir les nymphéas que Monet a immortalisés dans le monde entier... Quand les touristes japonais vont comprendre que l'étang n'est pas accessible, leur sourire va se figer… De plus, ils vont louper le fameux pont japonais…

         La journée commence bien… J’y suis, j’y reste ! Gonflés… ils n’ont même pas baissé le prix de l’entrée ! J’ai envie de taper sur le caissier. Je me retiens et paye.

         Je m’efforce de me calmer et me dirige vers le côté jardin de la maison du peintre.

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         C’est un curieux jardin. Il me surprend à chaque visite. J’en ai vu des jardins : des français réguliers et taillés de près, des « mixed borders » à l’anglaise, des méditerranéens luxuriants, sans compter les joyeux petits jardins de curés. Ce jardin là à une bobine différente des autres. Unique…

    241791e440133d87c8e5b1c2ac4eb85c.jpg     Des fleurs de toutes sortes et de tous formats se sont données rendez-vous ici. Les annuelles se mêlent aux vivaces, les fleurs les plus simples fréquentent les variétés les plus recherchées. Dahlias, campanules, rosiers, sauges, soucis, pavots, soleils, marguerites, lys… forment une palette multicolore où toutes les teintes se côtoient de façon un peu désordonnée.

     

         La maison rose rougit sous les lueurs de feux du massif de géraniums à ses pieds. Je descends l’allée extérieure qui mène habituellement à l’étang. J’enrage encore d’être privé des nénuphars et des effets de transparences que le peintre copiait inlassablement.

         La dernière fois que j'étais venu, un alsacien en visite à Giverny m’avait demandé avec un fort accent :

         -  Monet a vraiment souhaité cet étrange jardin ? 

          Je connaissais bien l’historique du jardin. Je répondis sans hésiter :

         -  Il a tout pensé ! Monet était un peintre jardinier, fou de fleurs. C’est l’œuvre d’une vie. Lorsqu’il s’installa ici il y f657a36c3a279dccd2738cc57255bbb2.jpgavait un verger de pommiers que l’on appelait le Clos Normand. Il arracha les arbres et créa son jardin en s’inspirant des traditions de jardins françaises, italiennes et anglaises. Cela donne le résultat original qui est sous vos yeux : un dessin en lignes droites avec des surfaces tirées au cordeau. Des arbustes et rosiers grimpants donnent du volume dans les plates-bandes. Les nombreuses variétés de fleurs posées de-ci de-là apportent la touche de folie de l’artiste… Vous n’aimez pas ? 

         L’alsacien n’avait pas répondu. Son regard explorait le foisonnement floral du décor. Il paraissait un peu perdu. J’insistai :

         - Vous savez, monsieur, les taches de couleurs ne sont pas posées au hasard ! Monet les orchestrait et reproduisait ensuite sur ses toiles toute cette beauté qui l’entourait.

         Mon interlocuteur se tripotait le nez avec application, peu attentif à mes explications. Il semblait pressé de continuer l’exploration du jardin. J’eus le tort de continuer à faire étalage de mes connaissances.

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    Claude Monet : Le jardin de Monet à Giverny, 1900, huile sur toile 81 x 92 cm, Paris, Musée d’Orsay 

        

        - L’artiste aimait peindre plusieurs toiles en même temps. Cela lui permettait de saisir les variations de la lumière aux diverses heures du jour. Vous devez sûrement connaître les « séries » qu’il réalisa sur le thème des meules, des peupliers, des matinées sur la Seine et, surtout, ses fameuses cathédrales de Rouen. Ces cathédrales… Il s’est usé les yeux à guetter des journées entières les moindres changements lumineux sur les vieilles pierres du monument ! ».

         L’alsacien peu intéressé par mon discours trop savant m’avait laissé en plan sans le moindre remerciement. Il s’était rapidement éloigné dans le jardin. L’ingratitude humaine…

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    Claude Monet : Une allée du jardin de Monet, Giverny, 1901, huile sur toile 80 x 92 cm, Vienne, The Österreichische Galerie

        

          Je contourne le jardin par le bas. Les allées intérieures sont réservées aux jardiniers. Installés devant l’allée centrale, les japonais mitraillent à tout va. Cette large allée est la plus belle du jardin. D’énormes roses grimpantes courent sur des arceaux en formant une voûte qui s’allonge jusqu’à la maison rose au fond. Des capucines orangées enflamment le sol.

         Devant moi, des enfants prennent quelques marguerites. C’est interdit. Le « solitaire de Giverny » les aurait certainement laissé faire. Il aimait les enfants. Savent-ils qu’ils cueillent des fleurs dans le jardin du « père de l’impressionnisme » ?

         J’ai fait le grand to64235c3803712f5c818ae0d543c66133.jpgur et me dirige vers la haute verrière qui servait d’atelier à l’artiste. Dans un poulailler, des volatiles se poursuivent en caquetant.

         Monet apprécierait son jardin aujourd’hui. Hormis les touristes qui arpentent les allées, l’ambiance que j’ai vue sur des photos anciennes est intacte. Le décor a gardé ce côté désuet d'autrefois. J’imagine le vieux peintre assis sur ce banc devant l’atelier, fumant sa pipe en attendant qu’Alice l’appelle pour le repas...

     

         Je sors.

     

    Claude Monet : Le jardin de Monet à Giverny, 1895, huile sur toile 81 x 92 cm, Zurich, Collection EG Bührle

         

        Les japonais rassasiés de photos sont en grande discussion sur le terre-plein faisant face du musée. L’un d’entre eux, petit, la figure mangée par de grosses lunettes de myope, s’avance vers moi. Son français est incroyable.

         - Savez-vous où est enterré le peintre Monet ?

         - Oui ! L’artiste repose dans le cimetière du petit village de Giverny. Suivez le chemin jusqu’à l’église à environ 800 mètres. La tombe est face à l’église. Vous la reconnaîtrez, c’est un grand monument sur la droite lorsque l’on monte vers l’entrée du cimetière. Il y a toujours du monde et souvent des fleurs… Vous aimez notre grand peintre national ?

         - Si je l’aime ? Au Japon, Monet est considéré comme le peintre de la lumière. C’est un immense artiste. Nous sommes venus en France exprès pour lui et ses amis impressionnistes. Hier, nous étions au Musée d’Orsay où beaucoup de leurs toiles sont exposées. Quelle émotion ! Notre seul regret est de ne pas avoir vu le jardin d’eau. Les Nymphéas...

         Le petit homme ne savait comment me remercier pour mon aide. Il voulut absolument me prendre en photo pour le souvenir.

       Il partit avec ses amis dans la direction que je lui avais indiquée. Soudainement, il se retourna et courut vers moi.

         - Donnez-moi votre adresse, je vous enverrai la photo !

     

                                                                                                                              Alain

     

                                                                                                                                                                                                                                                                                                      &
  • Un joyeux luron en Hollande - STEEN Jan, 1626 - 1679

     

     

          Il y a bien longtemps que je souhaitais parler de Jan Steen, ce peintre inclassable ayant vécu la grande période picturale du 17e siècle hollandais. Le fameux siècle d’or…

          Jan Steen est certainement, au milieu de tous les peintres surdoués qui marquèrent cette période de l’histoire de l’art, celui qui m’intrigue le plus.

          Il est un maître de premier ordre et a laissé une œuvre quantitativement importante. Il pouvait tout peindre : tableaux historiques, paysages, portraits, natures mortes, mais l’essentiel de sa production appartient à la peinture de genre. Dans ce style de peinture, il pouvait égaler les plus grands : De Hooch, Van Mieris, Ter Borch, Metsu, Dou, Maes... et parfois Vermeer.

          Ce qui le distingue réellement de ses collègues peintres hollandais est la complexité de certaines de ses compositions. C’était un marginal, car la préférence à cette époque allait habituellement aux intérieurs raffinés et élégants avec peu de figures.

          Dans ses compositions, il nous montre de multiples personnages de milieu populaire présentés dans une ambiance de joyeux désordre. Les faiblesses humaines sont son domaine : personnages peu recommandables, ivrognes, prostituées, truands. Son voyeurisme nous fait entrer dans des auberges, fêtes de famille ou lieux de débauche.

          Les parents de ce joyeux luron tenaient une auberge depuis plusieurs générations et lui-même gérera une brasserie à Delft ainsi que, sur la fin de sa vie, une taverne à Leyde. Ces lieux durent lui inspirer toutes ces scènes de beuveries, rixes et paillardises qu’il peindra et qui sont du plus grand comique dans ce siècle puritain. Par ailleurs, il possédait un sens étonnant de la mise en scène théâtrale, du détail soigneusement observé et une belle richesse dans l’utilisation des couleurs.

          Je prends un grand plaisir à montrer quelques-unes de ses œuvres que j’ai pu observer au Louvre ou dans des musées hollandais.

      

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    Jan Steen - La famille de l'artiste, 1665, Mauritshuis, La Haye
     

          La famille de l’artiste me réjouit dès le premier regard.

          De nombreux personnages joyeux semblent fêter la naissance d’un enfant qui dort dans les bras de sa nurse. Ce farceur de Steen se représente lui-même avec un sourire taquin en train d’apprendre à fumer à son fils qui aspire goulûment une longue pipe. Près de la fenêtre, une femme écarlate, probablement la femme de Steen, les pieds reposant sur une chaufferette, scrute l’écoulement du vin qu’un homme lui verse dans un grand verre qu’elle tend complaisamment. Quand à la grand-mère, au centre, elle paraît totalement éméchée. Elle chante en lisant un papier. A l’extrémité droite du tableau, un jeune garçon joue d’un instrument à vent qui s’apparente à nos binious bretons. Placide, un perroquet contemple la scène.

           

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    Jan Steen - La vie de l'homme, 1666, Mauritshuis, La Haye

     

           La vie de l’homme, montre un décor d’auberge. Des convives boivent et se régalent d’huîtres qu’une jeune servante, accroupie sur le sol au premier plan, prépare sur des plateaux. Assis sur le carrelage, un garçonnet espiègle fait danser un chaton qui ne semble guère apprécier le jeu.

           Par hasard, mon regard se dirige vers le premier étage de l’auberge. J’ai la surprise de distinguer dans l’ombre, allongé sur le plancher près des grandes fenêtres, un gamin, indifférent au spectacle convivial du rez-de-chaussée, tranquillement occupé à faire… des bulles.

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                                       Jan Steen - Fête dans une auberge, 1674, Musée du Louvre, Paris

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                                             Jan Steen - Dans la taverne, 1660, Rijksmuseum, Amsterdam

     

          Jan Steen a vu beaucoup de ces scènes d’auberge dans son existence. Il les retranscrit avec un réalisme jouissif dans ces deux autres toiles : Fête dans une auberge et Dans la taverne.

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                            Jan Steen - L'arrracheur de dents, 1651, Mauritshuis, La Haye

     

           L’arracheur de dents est armé d’une tenaille et tente d’extirper la dent d’un jeune homme assis sur une chaise, la bouche déformée dans un rictus de souffrance, les jambes trépignant violemment sur le sol. Sa pauvre mère, en prière devant lui, tente d’atténuer sa douleur. Sans pitié, des enfants  s’amusent beaucoup.

          Quelle horreur ! Moi qui n’aime pas les dentistes…

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    Jan steen - La femme ivre, 1673, Mauritshuis, La Haye
     

          Ce peintre ne reculait devant aucun genre de motif ! Cette fois, c’est vraiment dégoûtant ! Dans La femme ivre, une paysanne chancelante, le buste penché, sa robe largement entrouverte laissant échapper une poitrine opulente, est soutenue par une femme derrière elle dans le même état d’ébriété avancé. Autour d’elles, tous les villageois s’esclaffent et rient à gorge déployée. L’un d’entre eux joue du violon en se moquant ouvertement de la femme malade. Au fond, un cochon semble se délecter de la vomissure d’un homme écroulé sur le sol ivre mort…

     

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    Jan Steen - La mauvaise compagnie, 1665, Musée du Louvre, Paris
     

          Le lieu de La mauvaise compagnie semble être un endroit peu recommandable. Un joyeux désordre règne dans la pièce : des coquilles d’huîtres jonchent le sol avec des cartes à jouer, un verre brisé et le chapeau du garçon passablement éméché endormi sur les genoux d’une courtisane tenant un verre à la main.

          Pendant son sommeil, le jeune homme se fait tranquillement détrousser, par une femme placée derrière lui, de certains de ses accessoires, dont sa montre, que celle-ci remet à une vieille entremetteuse toute réjouie. Au fond, deux larrons, ricanent devant le spectacle.

     

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    Jan Steen - Enfants apprenant à danser à un chat, 1666, Riksmuseum, Amsterdam
     

          Les Enfants apprenant à danser à un chat semblent beaucoup s’amuser de ce jeu que l’on retrouve dans d’autres toiles du peintre. Il paraîtrait d’ailleurs qu’il s’agirait d’une race de chien néerlandaise ? En attendant, l’animal ne me paraît guère apprécier de devoir sauter sur ses pattes arrière.

     

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    Jan Steen - La joyeuse famille, 1668, Rijksmuseum, Amsterdam
     

          Cette Joyeuse famille profite largement des plaisirs de la table et du vin. Les enfants paraissent aussi éméchés que les parents. Serait-ce une scène moraliste dénonçant le mauvais exemple de l’ivresse suivi par les enfants ?

     

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    Jan Steen - Repas de famille, Musée du Louvre, Paris
     

          Un autre Repas de famille ou le vin coule à flot.

     

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    Jan Steen - L'offre galante, 1665, Musée royale des Baux-Arts, Bruxelles
     

          Malgré la piètre qualité de l’image, Je ne résiste pas à montrer L’offre galante qui présente le peintre en conteur facétieux. Un jeune homme bondit dans la pièce en grimaçant. Il porte un chapeau à plume de coq, symbole du fou, personnage populaire. Il offre à une femme un hareng et tient deux oignons dans l’autre main. Steen dénoncerait la vanité des plaisirs de l’ivresse et des jeux de l’amour.

          Du plus haut comique !

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                    Jan Steen - Femme à sa toilette, 1659, Riksmuseum, Amsterdam

     

          Je termine par cette adorable toile Femme à sa toilette que j’ai vue l’année dernière dans l’expo parisienne « L’âge d’or hollandais ».

          Ce n’est pas une scène de fête mais, dans la peinture de cette femme assise sur son lit, l’humour du peintre reste perceptible. La jeune femme, probablement une courtisane, fait sa toilette dans une attitude un brin érotique. Son visage souriant semble indiquer qu’elle est satisfaite d’elle-même et de son pouvoir de séduction.

          Cela ne semble pas émouvoir le petit chien qui a pris la place dans le lit…

          J’apprécie cette très belle petite toile d’une grande finesse.

     

     

           On est loin de la merveilleuse pureté et de l’intériorité des œuvres de Vermeer…

           Pourtant l'humour constant de ce peintre me plait. Son regard est incisif, humoristique, coquin, mais pas vulgaire. Son regard ne condamne pas. Il montre le plaisir que les personnages prennent à manger, boire, s’amuser. Il regarde et peint une manière d’être et de vivre.

          Cette peinture hollandaise ne nie pas les vices et les vertus mais les transcende dans une joie communicative que procure les plaisirs de la vie.

          Thoré Bürger, le découvreur de Vermeer, disait à ses lecteurs : « Les intentions burlesques de Jan Steen ont toujours une signification morale. » Peut-être avait-il raison ?

     

                                                                               Alain

        

  • Pastels à Orsay

     

     pastels, orsay

    Lucien Lévy-Dhurmer - la femme à la médaille, 1896, musée d'Orsay

     

    « Un art érotique »

     Le pastel stimule l’œil et en appelle aux antres sens. De ce fait, selon l’écrivain Ernst Jünger, il repose intrinsèquement sur « la valeur tactile de la couleur, une sensation d’ordre épidermique évoquant la pensée d’un contact ».

     

    Une centaine de pastels de la seconde moitié du 19e sur une collection riche de 500 œuvres, l’une des plus importantes au monde avec celle du Louvre pour le 17e et le 18e, sont présentés dans la magnifique exposition actuelle du musée d’Orsay.

    Négligé à partir de la Révolution française, c’est un nouvel âge d’or du pastel qui commence au 19e. Une résurrection ! De nouveaux pigments et supports comme le « Pastel Card » apparaissent. Le peintre Jean-François Millet, un des grands initiateurs du renouveau, avec « Le bouquet de marguerites » annonce une transformation dans l’usage du pastel. Désormais, la technique va cesser de se limiter uniquement au portrait pour devenir un merveilleux moyen pouvant exprimer le paysage, le nu et tous les genres. Tous les peintres avant-gardistes, ces impressionnistes adeptes de la touche divisée et de l’éphémère des choses, vont adopter plus ou moins ce mode d’expression, dont Manet, Toulouse-Lautrec, Gauguin, Degas, Morisot. 

    Plus tard, les symbolistes, Odilon Redon en particulier, vont exploiter l’extraordinaire plasticité du pastel pour faire surgir l’imaginaire au-delà du réel.

     

     

    Les pastellistes ont un rapport privilégié, presque sensuel, avec la technique du pastel, ces petits bâtonnets cylindriques composés de pigments en poudre amalgamés par un liant. Léonard de Vinci fut l’un des premiers à utiliser ce « mode de colorier à sec ». Cette technique propre est d’une grande facilité de travail : pas de préparation, aucune odeur, interrompre son travail et le reprendre à tout moment. Un bonheur ! Le seul inconvénient : la poussière. Les pastels ne se mélangeant pas entre eux, il est indispensable de posséder une grande quantité de bâtonnets de tonalités différentes. Conservée dans de bonnes conditions de conservation, la texture du pastel, grâce à sa pureté, ne jaunit ni ne fonce avec le temps et sa luminosité, son aspect velouté des couleurs restent intacts.

    Ce procédé, par sa texture lumineuse, son onctuosité, ses couleurs chatoyantes, une accroche exceptionnelle sur le support, comble les besoins d’émotion et de rapidité des peintres. Ils expérimentent les meilleurs effets possibles : hachures pour l’harmonie chromatique, pâtes obtenues avec de l’eau qu’ils travaillent avec les doigts ou la brosse. Toutes les ressources sont exploitées dans une orgie de couleurs. Autre possibilité inégalée du pastel : « dessiner en peignant, peindre en dessinant ». 

     pastels, carriera

    Rosalba Carriera – autoportrait, 1730, Gemäldegalerie Alte Meister, Dresde

    En 1720, avec la venue en France de la « Rosalba », la Vénitienne Rosalba Carriera, la mode du pastel est lancée en France. Cette technique chatoyante, colorée, spontanée et fragile, au rendu vaporeux, sera très recherchée tout au long du 18e siècle et les plus grands peintres s’y mettent : François Boucher, Jean-Baptiste Perronneau, Élisabeth Louise Vigée Le Brun, Maurice Quentin de la Tour. Même Jean-Baptiste Chardin commence à un âge avancé en utilisant déjà le principe du mélange optique des teintes : la touche hachurée, posée par superposition de couches successives, accrochait la lumière et donnait vie au personnage. Parfois, le pastel était écrasé directement sur le papier par de longues traînées de couleurs.

     

    QUELQUES TABLEAUX

    pastels, orsay, manet

    Edouard Manet - Irma Brunner la viennoise, 1880, Louvre

    Edouard Manet : « Portrait d’Irma Brunet », mon préféré du peintre, mêlant le noir de Manet dans le chapeau au corsage rosé découpé sur le fond gris. La touche rouge des lèvres pimente cette harmonie élégante. J’ai revu avec plaisir sa « Nana » Lumineuse courtisane en déshabillé au sourire mutin.

     

     pastels, orsay,degas

    Edgar Degas – Danseuses, 1884, musée d’Orsay, Paris

    Edgar Degas : « Danseuses » un contre-jour lumineux sur le tulle blanc des tutus et la peau laiteuse des dos et des cous gracieux des jeunes femmes. Les pastels de Degas, des feux d’artifice ! Il est le peintre qui, dans ses thèmes, utilise le plus cette technique du mouvement. Le peintre raffolait de la représentation des filles du peuple et leurs petits métiers : blanchisseuses, repasseuses, modistes, femmes nues, couchées ou se baignant. La pudeur bourgeoise était choquée : « Je les montre sans leur coquetterie, à l’état de bêtes qui se nettoient ». Il débusquait les corps féminins dans leur intimité. « Il a eu de la chance, ce Rembrandt ! Il peignait des Suzanne au bain ; moi, je peins des femmes au tub ».  

     

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    Odilon Redon - portrait de jeune femme au bonnet bleu, 1898, musée d’Orsay

    Odilon Redon : « Jeune fille au bonnet bleu », jeune femme portant une coiffe bretonne d’un bleu éclatant. « Le char d’Apollon », une des compositions les plus solaires du peintre est sur la première page du catalogue de l’exposition.

     

    pastels,orsay,cassatt

    Mary Cassatt – Mère et enfant sur fond vert, 1897, musée d’Orsay, Paris

    Mary Cassatt : « Mère et enfant sur fond vert », les vigoureux zigzags de pastel rouge et vert sur la robe laisse penser que la scène a été saisie dur le vif.

     

    Lucien Lévy-Dhurmer : « La Femme à la médaille », j’ai découvert ce tableau et ce magnifique peintre dans l’expo. La coiffe noire du modèle évoque celle des pays germaniques du 16e siècle.

     

    Cette superbe exposition dure jusqu’au 3 juillet prochain. Il faut faire vite.

     

     

  • Passion livres d'art

     

     

    Dans la bibliothèque d’un passionné de livres d’art

     

    Noël, Alain Yvars, bibliothèque

     

    Le réseau littéraire Babelio dans lequel j’interviens souvent m’a demandé, à l’occasion de Noël, une interview sur les livres d’art.

    Les amoureux de lecture, et plus spécialement de livres d’art, trouveront du plaisir à lire cette interview. L'image ci-dessus est un montage réalisé par Babelio...

     

     

    Interview du lecteur Jvermeer 
    À la rencontre des membres de Babelio

     

    Article publié le 29/12/2021 par Malaury Moyen

    Nous donnons régulièrement la parole aux membres du site pour qu'ils partagent avec nous leurs coups de cœur et nous dévoilent leur bibliothèque. En décembre, nous avons posé quelques questions à jvermeer un membre actif de Babelio, qui nous parle - entre autres - de beaux-livres et de peinture. 

     

     

    Rencontre avec jvermeer (Alain Yvars), inscrit sur Babelio depuis le 20 mars 2019

     

    Quand et comment êtes-vous arrivé sur Babelio ? Quel usage faites-vous du site ?

    Début 2019, je venais de publier mon roman « Que les blés sont beaux – L’ultime voyage de Vincent Van Gogh », résultat d’années de recherche et de documentation sur les deux derniers mois de Vincent Van Gogh à Auvers-sur-Oise. Il me fallait parler du livre et le faire connaître. Les membres de Babelio, amis littéraires, m’ont beaucoup aidé par les critiques nombreuses qu’ils m’ont offertes. Je me suis pris au jeu et, à mon tour, j’ai commencé à poster des critiques sur mes livres préférés. Dans le même temps, je lisais quotidiennement les écrits publiés par mes nouveaux amis.

     

    Pouvez-vous nous parler de votre bibliothèque (organisation, genres, apparence visuelle, etc.) ?

     livres d'art, Alain Yvars, bibliothèqueJ’ai plusieurs bibliothèques : une grande dans le salon et plusieurs plus petites dans mon bureau de travail. Ainsi, j’ai toujours à portée de mains les livres qui sont classés par thèmes, dans l’ordre de mes goûts de lecture : art, poésie, correspondances d’artistes, biographies, littérature générale. Je peux les visionner rapidement lorsque j’effectue une recherche ou veux entreprendre un nouveau travail.

     

     

     

     

     

    Quels sont vos genres de prédilection ?

    J’ai longtemps pratiqué la peinture comme pastelliste. Pour cause de douleurs visuelles, j’ai cessé de peindre.

    peinture, pastel

    Pastel - Mère et fille au jardin du Luxembourg

     

    Bien évidemment, mes thèmes favoris sont les livres sur la peinture, les arts et les correspondances de peintres. Depuis mon inscription sur Babelio, je me suis enthousiasmé pour la poésie, genre qui me correspond et possède un lien étroit avec l’art : « Si vous appelez la peinture une poésie muette, le peintre pourra dire du poète que son art est une peinture aveugle. » - Traité de la peinture, Léonard de Vinci.
    Les biographies, l’histoire, la littérature générale m’intéressent également, mais je m’économise en lecture, surtout celle des romans, pour les raisons visuelles dont j’ai parlé.


    Vous semblez avoir une attirance particulière pour les livres d’art, notamment les beaux-livres, assez largement représentés dans votre bibliothèque. Pouvez-vous nous en dire plus ?

    Les livres d’art sont effectivement les plus représentés dans mes bibliothèques. Avant la crise sanitaire, je visitais de nombreuses expositions et musées et, le plus souvent, en rapportais le catalogue correspondant. J’en profite pour parler des catalogues d’expositions qui sont ce qui existe de mieux en matière de beaux-livres d’art, par la qualité des images et des textes. Je possède aussi d’autres beaux-livres écrits sur un peintre en particulier ou un courant pictural. L’inconvénient de ces livres est le prix, malheureusement peu accessible pour les petites bourses. L’art n’est pas encore ouvert à tous…

     

    Ce chapitre sur l’art me donne l’occasion de parler de deux livres sur la peinture : Berthe Morisot de Sylvie Patry et Monet Une vie dans le paysage de Marianne Alphant.

    peinture,

     

    L’exposition 2019 de Berthe Morisot au musée d'Orsay, une des artistes majeures de l'impressionnisme, est d’une grande richesse. Près de la moitié des œuvres proviennent de collections particulières, souvent jamais montrées au public. Parmi de nombreuses toiles représentatives de son œuvre, je retiendrais la superbe Femme à sa toilette. « Berthe a l'art de faire vibrer le blanc dans toute sa pureté en le posant sur des gris légers », en dira Émile Zola.

     

    peinture, Morisot

    Berthe Morisot – Femme à sa toilette, 1875, Art Institute of Chicago

     

    À mes yeux, Berthe Morisot demeure la plus impressionniste du groupe de ces peintres qui avait la lumière pour religion. Le poète irlandais George Moore écrira après sa mort : « Ses toiles sont les seules toiles peintes par une femme qu'on ne pourrait détruire sans laisser un blanc, un hiatus dans l'histoire de l'art. »

     

    peinture,monet

    Cette superbe biographie de Marianne Alphant, illustrée de nombreuses documentations et photos en noir et blanc, est, à mes yeux, la meilleure de Claude Monet, la plus complète. Dans ce livre de 700 pages, l’auteur nous entraîne dans un itinéraire littéraire au gré de son inspiration. Nous sommes aux côtés de Monet, je dirais même en lui, avec tous ses amis avant-gardistes. De nombreuses citations ponctuent chaque phrase. La vie du peintre nous apparaît avec son environnement, ses amours, ses difficultés, son époque, et sa vision de cet art nouveau qui va bousculer irrémédiablement la peinture de cette fin du XIXe siècle en France. Le style de Marianne Alphant est un enchantement : foisonnement de connaissances, sens littéraire de la description picturale. L’étude du processus créatif du peintre cherchant l’impossible donne parfois le tournis. Ce n’est pas une biographie, mais de la poésie. 

     

    Quelle utilisation faites-vous de ce genre de livres ? Les lisez-vous d’une traite jusqu’à la fin ou y revenez-vous régulièrement, sélectionnant les passages qui vous intéressent ?

    J’ai tendance à tout lire, souvent rapidement. Je note régulièrement certains passages et images de tableaux qui m’intéressent. Je peux les utiliser plus tard pour parler d’un peintre dans un recueil personnel ou une chronique du livre sur Babelio.

    Comment choisissez-vous le prochain livre que vous ajouterez à votre bibliothèque ? Êtes-vous plus sensible à la couverture ? Ou poussé par l’envie de collectionner (avoir un livre sur chaque peintre, ou tous les livres possibles sur un peintre en particulier) ?

    Je ne suis pas collectionneur et la couverture des livres ne m’intéresse pas particulièrement, même si je suis sensible à un beau travail graphique. 

    J’aime toute la peinture, essentiellement figurative. En dehors des beaux-livres d’art, mon goût me porte souvent vers des petits livres qui m’intéressent : romans historiques, essais, biographies, correspondances. Le prochain livre sera… Attendez, je réfléchis ! Certainement sur la peinture impressionniste du XIXe, à moins que ce ne soit l’art hollandais du XVIIe que j’adore. Quoique la peinture italienne des XVe et XVIe… Peut-être me laisserai-je tenter par les excellents artistes français du XVIIIe avec les Watteau, Fragonard, Boucher ou La Tour ? Mince, j'allais oublier Chardin...

    Mon peintre préféré reste Johannes Vermeer que j’ai croisé au Louvre et lors de la grande exposition (celle du siècle ?) qui eut lieu au musée du Mauritshuis à La Haye en 1996. Elle rassemblait la presque totalité des œuvres peu nombreuses de l’artiste. Afin de mieux connaître la peinture du Sphinx de Delft, je conseille le magnifique catalogue de cette expo.

     

    peinture,vermeer


    La poésie m’intéresse aussi beaucoup en ce moment. 

    Est-ce que la forme d’un livre est importante pour vous (l’objet en lui-même, la qualité d’impression/reproduction des œuvres, la couverture, les illustrations, etc.) ?

    Je ne suis pas fétichiste sur l’objet livre. Je me laisse guider au gré de mes envies ou ressentis. Je préfère les beaux-livres richement illustrés, parfois techniques, mais pas trop. La qualité des reproductions est importante. Parler d’un peintre sans montrer ses œuvres dans une belle qualité est, à mes yeux, une offense envers lui, sauf s’il s’agit d’un essai riche en enseignements sur l’homme, ou bien une fiction romancée. 

    Quelle est votre première grande découverte littéraire ? Et votre première grande découverte artistique ?

    Ai-je vraiment eu une grande découverte littéraire ? Je suis très XIXe siècle. Les grands écrivains de cette période me font toujours rêver : Hugo, Flaubert, Balzac… J’ai un faible pour Guy de Maupassant et Émile Zola, dont les styles m’inspirent encore dans mes écrits.

    En matière artistique, autodidacte, j’ai découvert la peinture et les grands peintres progressivement tout au long de ma vie. Les peintres impressionnistes m’ont ébloui en premier : Monet, Renoir, Degas, Manet, Morisot, Sisley… Vous connaissez bien ces peintres qui peignaient sur le motif la lumière changeante, en utilisant des couleurs pures et une touche divisée pour capter les vibrations lumineuses, les émotions troubles. Ils couchaient sur la toile leurs impressions visuelles, l’aspect éphémère des choses. Ils avaient révolutionné, en plein XIXe siècle en France, la peinture académique. Les suivirent : Van Gogh, Seurat, Signac, Gauguin…

    Ensuite, j’ai découvert avec bonheur tous les artistes qui ont fait l’histoire de l’art, surtout les immenses Vermeer et Léonard de Vinci.

     

    peinture,monet

    Claude Monet – Camille ou La Liseuse, 1872, Walters Art Museum, Baltimore

     

    Quel est le livre auprès duquel vous êtes revenu le plus souvent ?

    Je parlerai de deux livres de mon enfance. Vivant seul avec ma mère, les livres n’étaient pas nombreux. Du fait de leur rareté, je relisais constamment deux livres sur le monde paysan au 19e : « La Terre chinoise » de Pearl Buck, une fantastique épopée chinoise qui m’ouvrait les portes de l’orient ; « La Terre » d’Émile Zola, portrait féroce sur la paysannerie en France.

     

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  • Claude Monet vous parle

     

    claude monet

    Claude Monet - Femmes au jardin (détail), 1867, Musée d'Orsay, Paris

     

     

    Vous partez peut-être pour des vacances bien méritées dans les jours ou les semaines qui viennent.

    Claude est heureux de vous faire savoir que la récente biographie d’Alain Yvars « Camille muse de CLAUDE MONET – Naissance de l’impressionnisme », publiée chez BOD, est enfin disponible avec retard chez tous les libraires physiques et numériques.

     

    Pour les peintres impressionnistes, le seul maître était la nature. Aurez-vous l'occasion, comme eux, en observant un paysage, de discerner la lumière changeante modifiant les couleurs au fil de la journée, la sensation fugitive et éphémère des choses ?

     

    Excellentes vacances à tous les lecteurs.

     

     

  • Petit papa Van Gogh

     

    van gogh, noël, cadeau, que les blés sont beaux

    Vincent Van Gogh - enfant avec orange, 1890, Winterthur, Suisse

     

          Tout le monde sait que Vincent aime les enfants. Ce matin, il a repensé à son enfance et s'est souvenu que Noël arrivait. 

         Avec un peu d'avance, il s'introduit chez vous pour vous offrir à partir de ce matin le téléchargement GRATUIT, durant 5 jours en format Ebook, de son roman QUE LES BLÉS SONT BEAUX : L'ultime voyage de Vincent Van Gogh.

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         Son offre se terminera jeudi prochain 19 décembre au matin. 

         Il vient également de me faire savoir qu'il venait de faire un petit don à l'Association Rêves qui aide les enfants très malades en leur permettant de s'évader ailleurs le temps d'une journée .

         Alors, à vos tablettes, liseuses, ordinateurs ou smartphones.

         Pour obtenir l'Ebook il suffit de cliquer  ICI

         Comme Vincent est heureux !

     

  • Des rêves étoilés

     

    Peinture,  Van gogh

    Vincent Van Gogh – Nuit étoilée, 1889, the museum of modern art, New York

     

     

    UNE MERVEILLEUSE ANNÉE 2020 À TOUS

     

     

    Un enfant… L’éveil à la vie. Quoi de plus beau. Un monde inconnu s’offre à lui, tellement vaste… Et puis, parfois, quelque chose d’imprévu survient : la maladie. L’entourage, les médecins, aident les enfants dans ce combat contre l’incompréhensible qui les empêche d’être heureux. Ils ont des projets. Ils rêvent…

    Une association s’est donnée pour mission de réaliser les rêves de ces enfants très gravement malades. Leur offrir la possibilité de s’évader d’un monde de douleur, réaliser leurs rêves, vivre des expériences inoubliables leur permettant de reprendre confiance en l’avenir, tel est le but de l’association Rêves. (http://www.reves.fr/)

     

    J’ai publié en 2019, en autoédition libre, mon roman QUE LES BLÉS SONT BEAUX : L'ultime voyage de Vincent Van Gogh. Les bénéfices procurés par sa vente sous forme de livres brochés ou ebooks ont été reversés à la fin de l'année 2019 à l’association Rêves. C’était peu mais j’espère faire mieux en 2020 avec une nouvelle publication qui va sortir en janvier : Un recueil de nouvelles : CONTER LA PEINTURE. En couleur, cette fois. J’en parlerai bientôt.

     

    Peinture,  Conter la peinture, que les blés sont beaux

     

    JE REMERCIE tous les lecteurs qui ont lu mon livre écrit à deux mains avec Vincent Van Gogh. Ils m’ont offert tout au long de l’année 2019, leur soutien pour le faire connaître sous la forme de chroniques ou critiques qui m’ont beaucoup touchée.

     

     

  • Une coquette et Rimbaud

     

     jan steen

    Jen Steen -La mangeuse d'huitres, 1658, Mauritshuis, La Haye

     

    Une jeune femme nous regarde avec coquetterie, tout en préparant une huître. Les huîtres étaient connues pour être aphrodisiaques et cette jeune femme semble offrir davantage qu’un excellent mets.

    Cette servante aurait très bien pu être celle dont parle Rimbaud dans « La Maline »

     

    La Maline                  

     

    Dans la salle à manger brune, que parfumait
    Une odeur de vernis et de fruits, à mon aise
    Je ramassais un plat de je ne sais quel met
    Belge, et je m’épatais dans mon immense chaise.

    En mangeant, j’écoutais l’horloge, – heureux et coi.
    La cuisine s’ouvrit avec une bouffée,
    – Et la servante vint, je ne sais pas pourquoi,
    Fichu moitié défait, malinement coiffée

    Et, tout en promenant son petit doigt tremblant
    Sur sa joue, un velours de pêche rose et blanc,
    En faisant, de sa lèvre enfantine, une moue,

    Elle arrangeait les plats, près de moi, pour m’aiser ;
    – Puis, comme ça, – bien sûr, pour avoir un baiser, –
    Tout bas :  «  Sens donc, j’ai pris ‘une’ froid sur la joue… »

     

    Arthur Rimbaud, Poésies

     

     

  • En souvenir de l’abbé

     

    Un homme de bien

     

     

    abbé pierre, poésie

     

     

         Dix ans le 22 janvier que l’abbé Pierre, personnalité préférée des français à l’époque, nous a quittés. J’ai retrouvé un petit poème que j’avais écrit le jour même sous le coup de l’émotion. Le voici légèrement modifié :

     

     

    Adieu l’abbé

     

     

    Tu voulais retrouver ton « Dieu amour »,

    C’est fait, te voilà avec lui pour toujours.

    Fini les combats, les disputes, les perfidies,

    Cela n’existe pas dans ta nouvelle vie.

     

    « Mes amis, je veux partir », disais-tu,

    Le criant sans cesse, d’un air têtu.

    « Vivement les grandes vacances ! »,

    Clamais-tu avec impatience.

     

    Ton Seigneur t’attendait depuis longtemps,

    Mais tu prenais ton temps.

    Il a dû être heureux en voyant ton sourire d’éternel gamin

    Et ton regard malin.

     

    Champion des causes perdues,

    Tu n’avais jamais déçu.

    Tu bravais les lois

    Pour qu’une femme, un vieillard, dorment sous un toit.

     

    Les puissants te craignaient.

    Bien sûr, tu les bousculais !

    Tu ne lâchais rien, vieux coquin,

    Pour aider les clodos, les moins que rien,

    Que la société rejetait

    Parce qu’ils étaient suspects.

     

    Maintenant profite l’abbé,

    Tu l’as bien mérité.

    Là-haut si tu rencontres quelques jolies naïades,

    Modère tes embrassades.

    Garde un peu d’énergie,

    Si par hasard tu croisais quelques sans-logis.

     

    Beaucoup pensent, Pierre, que tu es un saint.

    Un homme de bien,

    Et là, Pierre, tu étais le meilleur

    Toujours à l’écoute de ton cœur.

     

    Si tu as un peu de temps, l’abbé, demande à Dieu

    Qu’il s’occupe un peu plus des gueux,

    Des miséreux de ce monde qui n’ont rien,

    Ce sont des humains…

    Qu’il soit un Dieu pour tous et pas pour quelques-uns.

    On y pense, Pierre, toi… en Dieu… tu aurais été bien.