
Pistolet qui aurait servi au suicide de Vincent Van Gogh
Depuis quelques années, après plus d’un siècle de quasi-certitude, la thèse officielle du suicide de Vincent Van Gogh le 27 juillet 1890 est remise en doute. En 2011, des écrivains américains et, à leur suite, plusieurs auteurs, dans des biographies ou romans, ont émis une nouvelle hypothèse sur l’assassinat du peintre à Auvers-sur-Oise.
Ces parutions m’ont intrigué et interrogé car il ne me semblait pas que le suicide de Van Gogh pouvait être remis en doute.
J’invite donc les lecteurs qui ont lu totalement ou partiellement mon récent roman : QUE LES BLES SONT BEAUX – L’ultime voyage de Vincent Van Gogh, qui couvre les deux derniers mois de vie de l’artiste à Auvers, ainsi que les personnes que le sujet intéresse, de participer avec moi à un dossier-enquête sur la mort du peintre.
Cette enquête pourrait se faire en 4 parties : thèse officielle ; Souvenirs d’Adeline Ravoux, la fille de l’aubergiste Ravoux ; thèse de l’assassinat ; ma conviction personnelle sur le décès de l’artiste.
Je pense que ce dossier-enquête pourrait être enrichissant pour tous.
Première partie
THÈSE OFFICIELLE : CELLE DU VAN GOGH MUSEUM
Le Van Gogh Museum à Amsterdam possède la collection la plus importante au monde d’œuvres, dessins et correspondances consacrés à Vincent Van Gogh. Les experts du musée sont une référence mondiale et font autorité en la matière.
En ce début d’année 2017, j’ai cherché sur le site du Van Gogh Museum et ai trouvé une analyse succincte mais détaillée de la version officielle du musée sur les derniers jours de l’artiste à Auvers-sur-Oise. Les lecteurs qui visitent le site peuvent ainsi s'informer grâce à une présentation pédagogique.
Par ailleurs, une importante exposition, dont je parlerai ensuite, « AUX CONFINS DE LA FOLIE. La maladie de Van Gogh », s’est tenue au Van Gogh Museum l’été dernier.
J’ai traduit intégralement en français, ci-dessous, cette histoire de Vincent telle qu’elle est présentée en anglais sur le site.
LIRE L'HISTOIRE
Rencontrer Vincent
Le début de la fin
Vincent a quitté la clinique de Saint-Rémy en mai 1890, espérant qu'il serait capable de vivre de façon autonome avec sa maladie. Il trouve une certaine paix dans le village d'Auvers-sur-Oise, près de Paris, où il commence bientôt, une fois de plus, à peindre de façon prolifique.
Vincent a loué une modeste chambre mansardée à l'Auberge gérée par la famille Ravoux, pour 3 francs 50 la nuit. Il s'est accoutumé à partir chaque jour pour travailler dans la campagne environnante. Il utilisait la « salle des peintres » en bas pour peindre et stocker ses toiles.
Deux ans auparavant, la vie d'artiste à Paris avait laissé Vincent complètement vidé. Ses perspectives étaient sombres et il ressentait déjà des pensées de mort, même s'il était moralement opposé au suicide.
« On dira que c'est quelque chose comme, disons, le visage de - la mort », se référant à son autoportrait parisien « Autoportrait au chevalet » le représentant comme peintre.
Lettre d'Arles à sa soeur Wil, 16-20 juin 1888.
Dans ses différents courriers, il parlait souvent de suicide :
« Si j’étais sans ton amitié, on me renverrait sans remords au suicide et quelque lâche que je sois, je finirais par y aller. »
Lettre à Théo, Arles, le 30 avril 1889
« Je voulais te dire que je crois avoir bien fait de venir ici, en voyant la réalité de la vie des divers fous ou toqués dans cette ménagerie, je perds la crainte vague, la peur de la chose. »
Lettre à Theo et Jo, le 9 mai 1889 en arrivant à l’hospice de St-Rémy-de-Provence
Parfois, il mentionnait occasionnellement des pensées suicidaires, et non sans une touche d'humour:
« Chaque jour, je prends le remède que l'incomparable Dickens prescrit contre le suicide. Il se compose d'un verre de vin, d'un morceau de pain et de fromage et d'une pipe de tabac », écrivait-il à sa sœur Wil dans une lettre du 28 avril-2 mai 1889.
La fin d'une route difficile
Au cours de ce mois de juillet 1890, Vincent van Gogh sentait qu'il ne pouvait pas continuer. Les exigences immenses qu'il se faisait de lui-même, son travail obsessionnel, sa maladie mentale et, surtout, sa relation changeante avec son frère, devenaient trop perturbants pour lui. Vincent sentait qu'il avait échoué, à la fois comme artiste et être humain.
« Eh bien mon travail à moi j’y risque ma vie et ma raison y a sombré à moitié. (…) Mais que veux-tu ? »
Dernière phrase de la lettre inachevée à Théo, teintée de sang, annotée de la main de Théo : « La lettre qu'il avait sur lui le 27 juillet, cet horrible jour. »
Ce 27 juillet, il ne revint pas pour son repas du soir.
Connaissant la ponctualité de Vincent quand il venait dîner, M. et Mme Ravoux et leur fille commencèrent immédiatement à s'inquiéter.
Vincent arriva à l'auberge, gravement blessé, vers neuf heures. Quand Ravoux lui demanda ce qu'il avait fait, il répondit : « J'ai essayé de me tuer ».
Tôt le lendemain matin, Théo fut informé. Il se précipita de Paris au lit de Vincent, où il resta jusqu'à ce que son frère meure la nuit suivante.
Rumeur
Bien que Vincent lui-même ait dit à la famille Ravoux qu'il avait essayé de se suicider, une histoire circula à Auvers dans les années 1950 qu'il avait été abattu par des écoliers. Cela peut être rejeté, cependant, comme une simple rumeur.
Vincent pensait au suicide depuis un certain temps, et ne prit pas la décision à la légère. Avant de partir, d'ailleurs, il fourra ce qui était une lettre d'adieu à Théo dans la poche de sa veste. (Brouillon de la lettre inachevée teintée de sang qu’annotera Théo de sa main)
Lieu du suicide
Vincent se tira dessus dans les champs derrière le château d'Auvers, vu dans l'arrière-plan d’une de ses peintures du mois de juin « Paysage avec le château d’Auvers à la tombée du jour ».
Quatorze ans après la mort de Vincent, le fils du Dr Gachet peignit une vue de cet endroit à Auvers.
Ce qui était presque certainement l'arme du suicide a été trouvée près de soixante-dix ans plus tard par un agriculteur tout en labourant les champs derrière les meules de foin figurant dans la peinture peinte par Paul Gachet. (Voir, ci-après, l’exposition de l'été 2016 au Van Gogh Museum « Aux confins de la folie. La maladie de Van Gogh »
Une image de la mort

Vincent décrit ses tableaux comme « un cri d'angoisse » - quelque chose que nous ressentons très fortement dans la toile « Champ de blé avec un faucheur ». Il peignit « l'image de la mort, en ce sens que l'humanité serait le blé qu’on fauche ». Mais c'est une mort qui est « presque souriante. C’est tout jaune, sauf une ligne de collines violettes – d’un jaune pâle et blond. Je trouve ça drôle, que j’ai vu ainsi à travers les barreaux de fer d'un cabanon. »
Lettre à Théo, les 5 - 6 septembre 1889
Nuages d'orage au-dessus d'Auvers
Après un an, Vincent ne pouvait plus rester dans l'asile. Il retrouva quelque peu son équilibre à Auvers, mais des nuages d'orage se rassemblaient là aussi.
Vincent se sentait profondément menacé par le projet de Theo de s’installer comme négociant artistique à son compte. En plus du sentiment général d'échec du peintre, cela signifiait que son avenir était maintenant incertain ; son frère serait moins capable de s’occuper de lui. En fin de compte, il n’entrevoyait qu'une seule sortie.
« Je me sens – raté – voilà pour mon compte – je sens que c’est là le sort que j’accepte, et qui ne changera plus. »
Lettre d'Auvers à Théo et Jo, le 9 juillet 1890
La carte des funérailles
« Toute la place était en deuil, comme si l'un des nôtres était mort. La porte du bar était restée ouverte, mais les volets sur le devant étaient fermés. »
Dans une interview de 1953, Adeline Ravoux, 76 ans, décrit ses souvenirs de la mort de Vincent
Le lendemain de sa mort, le corps de Vincent fut couché dans la chambre du grenier dans la chaleur estivale de l'été, tandis que Levert, le menuisier local, construisait à la hâte un cercueil. Lorsqu'il fut livré le 30 juillet, l'artiste fut exposé dans la « salle des peintres », décorée par Théo et ses amis avec une sélection des œuvres de Vincent.
Vincent a été enterré le 30 juillet. Pour rendre les choses aussi faciles que possible pour ses amis artistes, Theo avait inclus les horaires des trains de Paris sur la carte des funérailles.
Le fournisseur de peinture de Vincent, le Père Tanguy, est venu à l’enterrement, de même qu'un certain nombre d'artistes, dont Emile Bernard, Charles Laval, Auguste Lauzet et le fils de Camille Pissarro. »
Souvenirs
Le portrait d'Adeline, la fille aînée d'Arthur Ravoux, était aussi accroché dans la pièce où était posé le corps de l'artiste. Vincent l'avait donné à son propriétaire avant sa mort, ainsi que sa peinture de l'hôtel de ville d'Auvers.
Des années plus tard, Adeline se souvenait encore des funérailles, dont beaucoup de détails nous sont connus grâce à elle.
Le cortège funéraire a fait son chemin de l'Auberge Ravoux au cimetière le mercredi 30 juillet, dirigé par un Théo affligé. Il fut suivi des amis parisiens de l’artiste et de son frère, de la famille Ravoux, des voisins et autres villageois qui avaient connu le peintre d'Auvers.
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